Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 141.djvu/871

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mobilières ou des droits de douane. Lorsqu’un député propose d’établir un impôt nouveau ou d’augmenter un impôt ancien, il tâche de se concilier a priori une clientèle, en faisant miroiter à ses yeux des diminutions ou des suppressions dans d’autres chapitres.

Bien qu’il ne soit pas possible, à propos d’un impôt spécial, de passer en revue toute l’organisation financière du pays, une relation trop intime s’est établie entre le problème des boissons on général et celui de l’alcool en particulier pour que nous n’examinions pas l’ensemble de la législation sur les premières. Un historique rapide, un exposé de la situation actuelle, un sommaire des principales législations étrangères, nous conduiront à l’examen des projets qui occupent aujourd’hui l’opinion publique et nous permettront de dégager la conclusion à laquelle il nous paraît sage de s’arrêter.


I

Les droits sur les boissons, sous l’ancien régime, faisaient partie de ce qu’on appelait les aides, c’est-à-dire ces contributions obligatoires qui peu à peu avaient remplacé le secours d’hommes armés ou le subside volontaire en argent. Des droits variés, portant le nom de droit de gros, de quatrième, de huitième, les anciens et nouveaux cinq sols, la subvention, frappaient les boissons inégalement, suivant la division territoriale la plus arbitraire[1]. Il existait vingt-cinq espèces de droits généraux et autant de droits locaux. Aussitôt que le vin ou l’eau-de-vie voyageaient, ils étaient atteints par les douanes intérieures ou traites et les péages que percevait également la ferme générale. L’ordonnance de Louis XIV sur les aides de 1680 établit un droit d’entrée sur les vendanges perçu aux barrières des villes, un droit de détail que doivent les habitans : « Seront tenus les vendans de vins, à la première sommation des commis, d’ouvrir leurs caves, celliers et autres lieux, pour y faire les visites nécessaires, et y être le vin inventorié. » L’ordonnance de 1680 reçut, au cours du XVIIIe siècle, de nombreux perfectionnemens, jusqu’à ce que la suppression des aides eût été prononcée le 2 mars

  1. Nous avons particulièrement mis à contribution, dans les pages qui suivent, les travaux de notre éminent collègue à l’Ecole des sciences politiques, M. René Stourm, membre de l’Institut.