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Hugo ? Des déesses, comme Leconte de Lisle ? De belles amoureuses, chastes ou passionnées, comme Lamartine ou Musset ? C’est beaucoup plus simple. Son imagination est satisfaite par la vue de trois modèles féminins qui, déjà mis à nu, se roulent à ses pieds, tandis qu’un quatrième, debout, enlève son dernier voile, j’allais dire sa chemise. Ce n’est pas un sérail en plein air, c’est un atelier. Nulle transposition, nulle exaltation, par conséquent, peu de poésie, et, ce qui est pis encore, dans l’exécution, peu d’entrain, pas de couleur, rien de pris sur tout ce vif qui semble mort. M. Surand avait débuté par des essais plus hardis, d’une facture inégale, mais souvent chaude et forte, d’une conception assez personnelle. D’où vient cette excursion inattendue dans le domaine académique ? N’est-ce pas que lui, comme tant d’autres, se laisse, hélas ! troubler annuellement par le dernier qui parle ou le dernier qui réussit ? Fragilité déplorable des convictions, instabilité stérilisante des esprits qui, depuis vingt ans, accumule les avortemens et les désespoirs. Buvez donc dans votre verre, sans tant regarder au verre du voisin ; liqueur forte ou douce, la nature et la vie y verseront toujours quelque chose ; à vous de savoir vous en contenter.

M. P.-Franck-Lamy et M. Gervais suivent leur voie avec plus de décision. M. Franck-Lamy, depuis longtemps, cherche l’accord de figures féminines, ni trop réelles, ni trop rêvées, ni trop déshabillées, ni trop costumées, avec un paysage assorti. Il apporte, dans cette recherche, où quelques-uns le suivent, quelques qualités fort appréciables : de l’élégance et de la chasteté dans le choix des formes, de la grâce et de la distinction dans l’indication des mouvemens et dans le goût des ajustemens, avec beaucoup de pauvretés et de timidités dans le rendu et dans la tonalité générale, d’un aspect d’ailleurs délicat, qui compromettent ces qualités. En vérité, ce Printemps nous paraît bien peu frais, peu fleuri, peu brillant, pour un printemps idéal, à nous qui avons, autrefois, connu l’ancien printemps. Mettons, après tout, que c’est un printemps à la mode de 1897, une sorte d’hiver tardif ou d’automne précoce, avec l’inquiétude d’une saison manquée et d’une espérance trahie ; le décor, dans ce cas, est vraisemblable, et les jeunes femmes (un peu clairsemées), nous sembleront, comme elles sont, d’aimables apparitions, qu’on ne serrerait pas de trop près sans doute sans les briser, mais qui ont du charme et de la jeunesse dans leurs allures fugitives. Dans sa Folie de Titania (le