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de buis, un chapelet accroché au-chevet d’un lit. La maison est aussi laïque que possible, mais un « certain esprit laïque » n’en a pas glacé et desséché l’air, et les restes du passé n’y sont pas systématiquement et ostentatoirement insultés. Tout n’y disparaît pas sous des plâtres révolutionnaires et des photographies de politiciens.

Quel avenir, cependant, s’ouvre à ces jeunes filles bien élevées, et douées de la valeur exceptionnelle que leur donnent leur admission et leur séjour à l’école ? Un avenir fort incertain. L’enseignement secondaire des filles comprend 35 lycées et 28 collèges, impliquant un personnel de 600 à 700 professeurs, chargées de cours, institutrices primaires, maîtresses répétitrices et directrices, en dehors des spécialités. Mais l’élève de Sèvres, dans la pratique, ne trouve pas toujours, ni tout de suite, une position. Elle se doit à l’État, mais l’Etat ne se doit pas à elle ; le personnel actuel est jeune, il y a peu de postes à pourvoir, et elle patiente, elle attend. Elle a beau être munie de son certificat, voire de la licence et de l’agrégation, les places sont occupées, il n’y a rien pour elle, et la faveur, d’autre part, est toujours là. A-t-elle des protections ? Connaît-elle des députés ? Sait-elle se pousser ? Est-elle « bien pensante. » ? Autant de chances pour elle de ne faire qu’un stage abrégé !… Mais si elle n’est hantée, par hasard, que de préoccupations transcendantes, des sciences ou des pensées auxquelles ses maîtres l’ont initiée, si elle manque d’intrigue, d’entregent, d’amis politiques, il lui faudra peut-être attendre et patienter bien longtemps, vivoter d’on ne sait quelles pauvres et plates besognes, avant de voir arriver les 2 500 francs en province ou les 3 000 francs à Paris, qu’elle rêvait autrefois après l’étude, en remontant, au bras d’une amie, les pentes et les gradins du parc, dans les vieilles allées pleines de feuilles et jalonnées de vases de fonte !


III

La plus haute école normale de filles, après l’école de Sèvres, est celle de Fontenay-aux-Roses, où se forment les maîtresses d’écoles normales primaires de province. C’est le centre du réseau, l’école-source d’où coule, par tous les conduits de l’Etat, dans toutes les cervelles féminines, l’esprit scolaire de la République. De fondation récente, ainsi que Sèvres, elle compte également