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le général Sébastiani, qui n’a pas oublié qu’on lui avait parlé de moi, et qui m’a comblé de politesses, doit me faire partir pour le camp de Navarin, où j’irai rendre compte de l’état des choses, et demander ce qu’il faut en cas d’attaque. Après le départ d’Ibrahim, on doit sommer la place. Le général affirme qu’ils refuseront et se défendront; nous croyons, nous, qu’ils refuseront, mais qu’ils ouvriront leur porte à la première démonstration. Au reste, deux promeneurs, qui y furent hier après nous, ont essuyé le feu de quelques factionnaires et de deux pièces, à poudre, disent-ils. Ils se sont retirés avant que la troisième ne fût plus expressive. Notre indiscrétion du matin les a rendus plus circonspects, et, depuis ce matin, ils ne font que tirer; nous ignorons sur qui et sur quoi.

Adieu, ma chère mère, je ne ferme pas ma lettre et t’écrirai encore du camp de Navarin. Si Godefroy voit le général Sébastiani, il peut le remercier, car son frère est on ne peut mieux pour moi...

Je vous embrasse tous bien tendrement et suis toujours bien portant, fort joyeux, et défiant toutes les fièvres grecques ou turques...


Camp de Navarin, 1er octobre 1828.

...Je suis arrivé en bonne santé. Ibrahim, qui a ce matin assisté à une revue, s’embarque demain et part. La brigade Schneider va opérer sur Patras, la brigade Higonet opérera sur Navarin et Modon; nous à Coron; je repars demain et me trouve toujours bien et content. Adieu.


Eugène Cavaignac à sa mère.


Au camp sous Navarin, 12 octobre 1828.

Tu vas me trouver bien remuant, ma chère mère, mais garde-toi de t’en inquiéter; car c’est, je crois, un excellent préservatif contre la maladie ; aussi me porté-je toujours fort bien, grâce, d’une part, au bon coffre que tu m’as donné, et, de l’autre, à la grande confiance que j’ai dans ma bonne étoile. Les journaux t’apprendront, quelques jours avant moi sans doute, l’occupation des trois places par la division française. Effectivement, aussitôt après le départ d’Ibrahim, la 2e brigade[1] se rapproche de Navarin.

  1. C’est la brigade Higonet.