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servait pour désigner un morceau de musique quelconque, tandis qu’au XVIIIe siècle il s’appliquait soit à un accompagnement instrumental, soit à l’orchestre lui-même qui était chargé de cette exécution. Au sens où nous l’entendons aujourd’hui, la symphonie à orchestre est née du jour où, sans le secours de la voix humaine, plusieurs instrumens furent joués simultanément. Mais ces instrumens primitifs devaient eux-mêmes subir bien des modifications avant d’arriver à l’état où nous les voyons.

Les instrumens à vent semblent avoir précédé tous les autres. Plus faciles à inventer, puisqu’une branche d’arbre évidée ou un roseau percé de trous en fournissent naturellement à l’homme les matériaux, les sons qu’ils rendent y sont aussi plus directement produits par notre souffle, et ils se rapprochent par conséquent davantage des conditions de la voix. Dans les plus anciens monumens, nous voyons donc figurer des flûtes, des trompes, des trompettes et aussi les instrumens à percussion les plus élémentaires, tels que les tambourins et les cymbales. Ce sont là, du reste, les instrumens que de notre temps encore les voyageurs retrouvent chez les peuplades les plus arriérées et les plus sauvages. Vinrent ensuite les instrumens à cordes, pincées directement ou vibrant sous la pression de l’archet. Bien que, — malgré les récentes découvertes de M. Homolle et les belles recherches de M. Gevaërt, — il soit difficile de nous éclairer d’une manière positive sur la musique des anciens, il ne semble pas que ceux-ci aient jamais songé à grouper ces instrumens de manière à former un ensemble qui méritât vraiment le nom d’orchestre. D’après les bas-reliefs et les inscriptions relevées par l’épigraphie relativement aux prix décernés dans les concours musicaux, il est permis de croire qu’ils ne pratiquaient ces groupemens que d’une manière fort restreinte, et que s’ils se préoccupaient du dessin mélodique, du rythme et de l’accentuation de leurs chants, l’harmonie, celle de la musique instrumentale surtout, demeura chez eux très élémentaire.

Avec le moyen âge reparaissent non seulement tous les instrumens usités dans l’antiquité, mais beaucoup d’autres encore que nous trouvons représentés dans les statues, les bas-reliefs ou les miniatures de cette époque, et M. Lavoix, dans une intéressante étude sur la Musique dans l’Imagerie du moyen âge[1], s’est appliqué à rechercher les différens types d’instrumens dont on se servait alors. Les Tableaux de Paradis de l’Ecole de Cologne, les volets supérieurs de l’Adoration de l’Agneau de van Eyck,

  1. Un vol. in-8o ; Pottier de Lalaine, 1875.