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de la ligne, et mêlés à eux, s’étaient battus comme d’anciens soldats.

Enfin, pendant cette même guerre, un exemple plus frappant de la force morale et de la discipline résultant de l’encadrement est encore à citer. Au mois de janvier 1870, le 25e corps d’armée français occupait Vierzon et la région environnante : une des brigades de ce corps d’armée se composait de deux régimens : l’un, formé de gardes nationaux mobilisés, l’autre, de compagnies de marche de l’armée régulière. Les recrues de l’infanterie de ligne, qui composaient ces compagnies, appartenaient à la classe 1870, appelée par anticipation ; elles avaient à peine quelques semaines d’instruction dans les dépôts, mais étaient encadrées par quelques vieux soldats et gradés de l’ancienne armée. Les gardes nationaux mobilisés, qui formaient l’autre régiment de la brigade, avaient été levés en même temps que les recrues de la classe 1870. Ces deux régimens étaient donc composés d’hommes la plupart aussi novices les uns que les autres.

Vers le milieu de janvier, le général commandant le 25e corps d’armée se portait sur Blois pour enlever cette ville aux Allemands qui l’occupaient. L’ordre de mouvement avait été donné la veille au soir, et la brigade mixte indiquée ci-dessus devait quitter Vierzon à huit heures du matin pour se diriger sur le théâtre des opérations. Or, au moment du départ, le lendemain matin, le général commandant la brigade ne trouvait réuni que le régiment de marche d’infanterie avec lequel il se portait d’ailleurs immédiatement en avant. Le colonel du régiment de mobilisés, désespéré, venait lui rendre compte qu’il avait été dans l’impossibilité de réunir ses compagnies.

Le soir, en rentrant à Vierzon, à la tête du régiment de ligne, qui s’était admirablement comporté, le général de brigade rencontrait, aux portes de la ville, le corps des mobilisés, qui en sortaient seulement et qui sans doute, pour se remonter le moral, tiraient à tort et à travers des coups de fusil dans toutes les directions. Ces hommes, plus âgés cependant que les recrues de la ligne, dont par conséquent le moral devait être plus solide que celui de ces jeunes soldats, encore des enfans, n’avaient pas marché parce qu’ils étaient mal encadrés.

Qu’il soit permis enfin de citer comme un dernier exemple frappant la marche sur Tananarive, pendant la campagne récente de Madagascar, de la colonne mobile de deux à trois mille hommes seulement, qui enleva la capitale des Hovas. Cette colonne, parfaitement organisée et encadrée, fit une véritable trouée parmi les ennemis vingt fois plus nombreux, qui lui tenaient