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la fécule est déposée, à une température de 75°, suffisante pour coaguler l’albumine : elle est dès lors devenue insoluble, et si on fait filtrer les eaux sur les pulpes destinées à l’alimentation du bétail, on augmente beaucoup leur valeur nutritive ; en outre, on peut impunément rejeter dans les ruisseaux les eaux dépouillées de l’élément putrescible qu’elles renfermaient. Il est bien à remarquer cependant que réchauffement de la grande masse d’eau nécessaire à l’extraction et au lavage de la fécule est coûteux, et que c’est seulement quand on ne peut pas employer directement les eaux de féculerie aux irrigations ou les rejeter impunément en dehors des usines qu’on se résigne à séparer l’albumine qu’elles renferment.

Jusqu’à présent, nous ne produisons en France, à l’aide des pommes déterre, que de minimes quantités d’alcool : les usines qui avaient été montées ont même suspendu leurs opérations, par suite du bas prix actuel de l’alcool. L’année 1893 a produit une énorme quantité de fruits de toute espèce ; les bouilleurs de cru s’en sont donné à cœur joie ; et la fraude s’est tellement étendue que les cours de l’alcool régulièrement fabriqué se sont effondrés.

En Allemagne, il n’en est pas ainsi : sur les 4 millions d’hectolitres d’alcool jetés annuellement sur le marché, 3 millions proviennent des pommes de terre. Cet alcool est surtout produit dans de petites distilleries agricoles analogues à celles qui ont prospéré chez nous pendant quelques années, après le ravage de nos vignobles par l’oïdium ; en France, on employait surtout comme source d’alcool la betterave, les Allemands au contraire utilisent la pomme de terre. La fabrication comprend trois opérations distinctes : il faut d’abord, suivant l’expression consacrée, saccharifier la fécule ; puis déterminer par fermentation la transformation du sucre produit en alcool ; et en lin séparer cet alcool par distillation du liquide où il a pris naissance.

La première de ces opérations, la saccharification de la fécule, met en jeu ce ferment soluble que nous avons vu se développer dans toutes les graines qui entrent en germination, la diastase : on l’emprunte à de l’orge germée. Les pommes de terre cuites à la vapeur, écrasées entre deux cylindres, tombent dans un grand vase. On y introduit, en outre, de l’orge germée en poudre et de l’eau portée à 50°environ ; puis, à l’aide d’agitateurs mécaniques, on brasse énergiquement le mélange. D’abord pâteux, il se fluidifie rapidement. Après quatre ou cinq heures la fécule est dissoute ; elle s’est combinée à une petite quantité d’eau pour former un sucre analogue à ceux qu’on trouve dans les fruits, la glycose : on sépare le liquide des principes non saccharifiables de la