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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 novembre.


Voilà trois semaines que la Chambre des députés a rouvert sa session, et, si on excepte la journée d’avant-hier où a été posée la question de Madagascar, on serait bien embarrassé de dire ce qu’elle a fait de vraiment utile. Sans doute, on peut glaner à travers ses séances quelques faits divers parlementaires qui ne manquent pas d’intérêt, mais le résultat pratique est bien insignifiant. Est-ce la faute de la Chambre ? Non. Elle n’a rien fait parce qu’on ne lui a donné rien à faire. Il en est des chambres comme des individus, pour lesquels l’oisiveté est la mère des mauvaises habitudes. Nous reprenons au commencement de cette chronique le vœu par lequel nous terminions la dernière, à savoir qu’on ne convoque désormais le Parlement en session extraordinaire de fin d’année que lorsque le budget sera prêt à être discuté. Cette manière de procéder aurait un double avantage : d’abord de stimuler au travail la commission du budget en lui laissant la responsabilité des retards qu’elle apporterait à la réunion du Parlement, ensuite de mettre dès le premier jour celui-ci aux prises avec un labeur sérieux. Il n’y a pas de meilleure école de discipline que celle-là. Que peut devenir une assemblée lorsque, en attendant la nourriture substantielle qu’on lui a promise, on amuse son appétit avec un feuilletage parlementaire sans consistance ? Elle devient la proie des interpellateurs. On avait annoncé depuis longtemps tout un lot d’interpellations. Il y en avait une sur M. Mirman, jeune professeur nommé député avant d’avoir accompli son engagement décennal dans l’Université, et qui avait, pour ce fait, des démêlés avec le ministre de la guerre. Puis une seconde, adressée au ministre de la guerre pour le désordre que des mesures récentes ont porté dans l’armée. Une troisième sur les fonctionnaires qui, faisant partie de conseils électifs, ont pris une attitude hostile à l’égard du gouvernement. Enfin une quatrième sur l’orphelinat de Cempuis et son incroyable directeur, M. Robin. De ces quatre interpellations, une seule était redoutable, celle qui concernait l’application de la loi du recrutement faite par le ministre de la guerre. Quant aux autres, on ne pouvait pas rendre au gouvernement un plus grand service que de les lui adresser.

Le cas de M. Mirman se trouvait un peu compliqué par la décision de la Chambre qui, l’année dernière, avait validé ses pouvoirs. Aux