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fournissaient la crainte de la venue des infidèles et l’impuissance où se trouvaient ces populations sans cohésion de s’opposer à l’occupation étrangère, Moulaï-el-Hassan leur démontra que toutes devaient s’en remettre à sa souveraineté pour avoir raison de ces tentatives. La contrée qui fit ainsi, dans l’été de 1882, sa soumission nominale au sultan est comprise entre l’ouad Sous au nord, l’Océan à l’ouest, l’ouad Draa au sud et les Aït ou Mribet au sud-est.

Durant la marche de retour, la cour chérifienne força à l’obéissance toutes les populations dites du Sahel et aussi de la vallée de l’ouad Sous depuis l’embouchure jusqu’à Ras-el-Oued. Ces résultats politiques rapidement atteints ne l’avaient été qu’sn raison de la famine et de l’état précaire où vivaient les populations. Ils ne devaient être que de courte durée. Malgré les lettres triomphales expédiées dans toutes les villes de son empire, à peine le sultan était-il revenu à Merâkech, exténué et avec son armée décimée, en août 1882, que toutes ces mêmes tribus que l’on venait de soumettre se préparaient de nouveau à la rébellion. Il leur avait suffi de pouvoir escompter le produit d’une récolte qui s’annonçait sous des auspices favorables.

En mars et avril, le sultan avait reçu l’ambassade de M. Ordega, venu présenter ses lettres de créance et régler par la même occasion avec le makhzen plusieurs affaires délicates qui avaient trait notamment à des indemnités dues par le gouvernement chérifien pour des méfaits et dommages causés par les tribus marocaines le long de la frontière algérienne. À cette même époque, nous avions eu des difficultés avec le parti des Oulad-Sidi-Cheikh-Gharaba et notre représentant en agissant avec énergie et habileté obtint les solutions désirées.

Après une année de repos passée à Merâkech, Moulaï-el-Hassan se remettait derechef en marche et prenait la direction de Meknas. L’objectif de la campagne était en apparence de soumettre certaines tribus du Tadela, et d’y prélever de longs arriérés d’impôts, mais en réalité le sultan se proposait de recueillir les premiers fruits de son entente avec le marabout de Bou-el-Hjad, triomphant par sa diplomatie intérieure des résistances et des hésitations de la grande tribu des Zaiane inféodée à l’autorité morale et religieuse de la famille des Ben-Daoud. La démarche fut couronnée d’un plein succès, car Mohammed-ou-Hammou, le chef de cette tribu, la plus puissante qui soit au nord de l’Atlas, — dont les cavaliers sont innombrables et dont le territoire s’étend au nord du Tadela, commandant les communications vers Meknas, — ne tarda pas à entrer en composition avec le sultan. Quatre années