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rive droite du Logoné, et arrivait le 23 mars 1893 à Akassa, ayant le bonheur de ramener sains et saufs ses compagnons après une exploration qui n’avait pas duré moins de quatorze mois depuis son arrivée à Loango et au cours de laquelle il avait parcouru 5 000 kilomètres environ.

Les tentatives de pénétration vers l’intérieur par l’Oubangui avaient eu lieu aux frais du Comité de l’Afrique française, qui avait agi sans engager en quoi que ce soit les ressources ou la responsabilité de l’État. La pénétration par l’autre voie navigable, la Sangha, fut l’œuvre exclusive du gouvernement du Congo. Dès 1890, un des fonctionnaires de l’administration du Congo, M. Cholet, avait fait une première exploration de ce fleuve. Il le remontait jusqu’à son confluent le Ngoko, et le 30 mars atteignait la ville de Comasa. Quelques mois plus tard, MM. Fourneau et Gaillard établissaient un poste à Ouesso. L’hostilité des indigènes les obligeait à regagner le bas-Congo, mais M. de Brazza en personne reprenait leur projet de pénétration. En novembre 1891, il installait une station à Bania, faisait franchir au Courbet les rapides qui s’y trouvent, explorait les branches les plus élevées de la Sangha et faisait en même temps œuvre politique en entrant en relations avec le gouverneur ou lamido de Ngaoundéré. Lui-même se rendait dans l’Adamaoua méridional à Gaza, et en décembre 1892 envoyait à Yola un de ses agens, M. Ponel, qui reçut de l’émir le meilleur accueil.

Mais dans nos tentatives pour atteindre le lac Tchad, nos efforts ne se bornèrent pas seulement à remonter le cours de l’Oubangui et celui de la Sangha. Nous utilisâmes aussi les deux routes qu’ouvraient devant nous le Sénégal et le Niger, et dans ce dessein furent organisées les deux missions de Monteil et de Mizon. Presque à la même époque où Fourneau et Gaillard partaient pour explorer la Haute-Sangha, où Crampel remontait l’Oubangui, Monteil partait de la côte occidentale d’Afrique, traversait le pays situé au midi de la boucle du Niger, arrivait à Saï, puis, longeant la ligne frontière acceptée par nous en 1890, visitait les États de Sokoto et de Bornou, touchait aux bords du lac Tchad et terminait enfin à Tripoli un magnifique voyage qui n’a d’analogue que ceux de G. Rohlfs et de Nachtigal dans ces régions. De son côté, au mois d’octobre 1890, Mizon remontait le Niger ; mais, arrêté dès le cinquième jour de sa route par l’hostilité des indigènes sujets de la Compagnie, il devait se replier avec ses blessés sur Akassa. Une seconde tentative plus heureuse l’amenait à Yola ; mais là, apprenant l’état troublé de la région au midi du Tchad, il renonçait à aller plus avant et, s’enfonçant droit au sud dans la