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40 000 francs, en 1790, soit une hausse de 550 pour 100. La hausse du terrain que nous avons évaluée, pour la totalité du périmètre des fortifications, à 28 francs le mètre au XVIIIe siècle, et qui vaut aujourd’hui 130 francs, n’aurait été que de 360 pour 100.

Restent les maisons des dix arrondissemens excentriques de Paris, qui, au moment de la Révolution et presque jusqu’à nos jours, étaient administrativement en dehors de la capitale. Ils renferment 55 000 maisons, évaluées à 3 milliards 600 millions, par conséquent à 66 000 francs chacune. Celles-ci composaient cette ceinture de banlieue, moitié rurale, moitié urbaine, dont la propriété ne pouvait se classer ni parmi les villages ni parmi les villes de province. Si toutefois nous l’assimilons à ces dernières, où les maisons se vendaient, voilà un siècle, 5 800 francs, nous les trouverons onze fois et demi plus chères qu’elles n’étaient alors, tandis que l’ensemble des cités françaises n’a progressé que d’un peu plus du double : de 5 800 à 13 800 francs, chiffre de la récente enquête faite par la direction des contributions directes.

Un statisticien aussi ingénieux que prudent, M. de Foville, interprétant les résultats de cette enquête colossale, estimait à 17 milliards la somme que coûterait aujourd’hui Paris s’il était à vendre. Il comprenait naturellement dans ce total, avec les 83 000 maisons privées, les monumens publics, les terrains non bâtis, le sol des rues et des promenades. Qu’aurait donc coûté le Paris de nos pères ?

Au XVIe siècle, où l’on comptait dans la capitale 14 000 maisons à 4420 francs chacune, la propriété bâtie représenterait 52 millions de francs. En accordant à chaque immeuble une contenance de 400 mètres carrés, les maisons, avec leurs cours et leurs jardins, auraient occupé un espace de 500 hectares. Il resterait ainsi 7 240 hectares (sur 7 800) non bâtis, ou supposés tels ; quoique à la vérité il y eût dans ce périmètre qui représentait alors les faubourgs et la banlieue de la capitale de François Ier et de Henri III, un assez grand nombre de constructions semi-rurales et d’habitations de plaisance, que nous faisons figurer ici seulement pour mémoire. Leur valeur devint pourtant assez sérieuse, aux XVIe et XVIIe siècles, à mesure que la ville proprement dite s’étendait et se rapprochait de son enceinte moderne. Cette omission volontaire compensera l’exagération dont pourraient sembler empreintes nos évaluations du sol non bâti. A 56 centimes le mètre, ces 7240 hectares formaient, il y a trois cents ans, un chiffre de 40 millions de francs qui, joint aux 52 millions de maisons, constituent un prix total de 92 millions pour le Paris du XVIe siècle.

Au XVIIe siècle les 20 000 maisons de Paris valaient ensemble