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lancé toutes les ressources de son génie analytique à l’attaque de ce problème, nombreux ont été les efforts tentés pour le résoudre et nombreuses les solutions proposées ; sur la distribution de l’éther dans les interstices des molécules matérielles, sur les forces qui s’exercent entre l’éther et la matière, sur la part que l’éther prend au mouvement de la matière et la matière au mouvement de l’éther, sur l’existence ou la non-existence du frottement en de semblables systèmes, les hypothèses les plus variées ont été émises par Cauchy, par Briot, par M. Boussinesq, par M. Sarrau, par M. Helmholtz, par une foule d’autres physiciens qu’il serait trop long de citer.

À quels résultats certains cette mêlée d’idées aura-t-elle conduit les physiciens ? Il est difficile de le dire ; au fort de la bataille, il est malaisé de désigner le vainqueur et de prédire les conséquences de la victoire.


IX

Aussi bien, une idée nouvelle a surgi qui, peut-être, rendra vaines toutes ces luttes et portera ailleurs le terrain de la guerre ; cette idée est issue du progrès des théories électriques.

Au siècle dernier, on regardait simplement les corps isolans comme des corps inertes au point de vue électrique ; les abandonne-t-on à eux-mêmes ? ils ne s’électrisent en aucune circonstance ; dépose-t-on, en quelque point de leur surface, par frottement ou par tout autre moyen, une charge électrique ? cette charge reste où on l’a mise.

À la fin du xviiie siècle, Cavendish d’abord, Coulomb ensuite, entrevirent que le rôle électrique des corps isolans ne devait pas être aussi simple ; ils émirent à ce sujet une hypothèse qui fut ensuite retrouvée par Faraday ; cette hypothèse, Faraday l’a développée, l’a soumise au contrôle d’expériences variées ; elle est aujourd’hui devenue classique ; la voici :

Lorsqu’un corps mauvais conducteur, un morceau de soufre ou de paraffine, par exemple, est mis en présence de corps chargés d’électricité, il se trouve dans un état tout à fait comparable à l’état d’un morceau de fer doux qu’on approche d’un aimant ; on sait qu’en présence d’un aimant, chacun des volumes infiniment petits que l’on peut imaginer dans une masse de fer doux s’aimante par influence ; ce volume infiniment petit prend deux pôles magnétiques, c’est-à-dire qu’il exerce sur les aimans placés à quelque distance les actions mêmes qu’exerceraient deux charges magnétiques égales, formées l’une de fluide austral, l’autre de