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ne veux pas respirer votre encens… Loin de moi le bruit de vos cantiques, les accords de vos instrumens, mais que la justice s’épanche connue l’eau, et qu’elle coule comme un torrent (5-21). »

Il y a dans Amos un verset où le prophète, glorifiant la grandeur de Jehova, qui a fait le jour et la nuit, qui appelle à lui les eaux et les reverse sur la terre, ajoute un trait particulier : « C’est lui qui a fait Kima et Kessil (5-8). » D’après tous les témoignages, ces noms désignent deux constellations, dont la seconde est reconnue pour Orion ; quant à l’autre, ou hésite entre l’Ourse et les Pléiades. C’est encore là pour moi la marque d’une date récente. Je ne crois pas qu’au VIIIe siècle avant notre ère, les Hébreux, qui paraissent avoir été si peu curieux, aient eu la curiosité de distinguer les constellations et de les nommer[1].

Le nom d’Amos, dans la Vulgate. rappelle celui d’un Amos, père d’Isaïe (II Rois, 19-2). Mais ces deux noms ne s’écrivent pas de même en hébreu.


Abdias n’a qu’une page, qui est un chant de triomphe sur la soumission de l’Idumée et les victoires d’Israël (sous Simon et Hyrcan) sur les Iduméens et les Philistins.


Jonas est bien le nom d’un prophète des temps antiques, qui figure au second livre des Rois (XIV, 25), sous Jéroboam, roi d’Israël ; mais le livre qui porte le nom de Jonas n’est nullement une prophétie, et il n’y a que ce nom qui ait pu le faire placer parmi les livres prophétiques, auxquels il ne ressemble en aucune façon. D’après le récit curieux qui remplit ce livre, on sait que Jonas, dans le ventre du poisson qui l’a avalé, adresse à Jehova une prière. Cette prière n’a aucun rapport avec celle situation. Elle n’est qu’une espèce de psaume qui n’exprime en réalité que la douleur d’un Fidèle privé de son Temple et de son dieu sous la tyrannie des Nations. C’est une poésie antérieure sans doute à la fable qui fait le sujet du livre, et qui l’a suggérée. La métaphore du second verset a été prise à la lettre : « Du fond de ma misère, j’invoque Jehova, et il m’exauce ; de l’abîme souterrain, je crie et tu écoutes ma voix. Tu m’as jeté au plus profond de la mer, et les eaux m’ont enveloppé et submergé. Et j’ai dit : « Me voilà rejeté loin de les yeux, mais je reverrai encore le Temple de ta sainteté… Quand la vie s’éteignait en moi, je me suis souvenu de Jehova, et ma prière est venue jusqu’à toi dans ton saint Temple (2-3). »

Il y a dans Jonas, surtout à la fin, un sentiment religieux

  1. Cela s’applique aussi au livre de Job.