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eut à rappeler à l’ordre les Hamyane-Gharaba d’abord, les Beni-Snous plus tard, et dans les environs de Bougie, où le général Gentil infligea, les 5 et 6 juillet, aux Mzaïa, deux échecs qui les réduisirent à demander grâce et à payer des amendes effectives.

En fait, pour être un peu moins bloquée qu’elle ne l’avait été depuis treize ans. Bougie, de même que ses congénères Djidjeli et Collo, n’en demeurait pas moins sans communications constantes, régulières et sûres, avec le reste de l’Algérie. Comme des échantillons de minerai dans leur gangue, elles étaient empâtées dans les montagnes kabyles. Il y a de la frontière du Maroc à la frontière tunisienne beaucoup de montagnes, et par conséquent beaucoup de Kabyles, mais l’usage a prévalu de réserver le nom de Kabylie à la partie du littoral comprise entre l’Isser à l’ouest et l’Oued-Safsaf à l’est; et dans cette partie même on distingue la Grande Kabylie ou Kabylie du Djurdjura, de la Petite Kabylie ou Kabylie des Babors. Elles sont séparées l’une de l’autre par le cours de l’Oued-Sahel, qui, sous le nom d’Oued-Soummam, se jette dans la mer au-dessous de Bougie. Bougie se trouve donc à la limite des deux Kabylies. La Grande est une forteresse énorme qui a pour escarpe au sud le Djurdjura et l’Oued-Sahel pour fossé. Au nord, entre le Djurdjura et les montagnes moins élevées qui bordent la côte, court de l’est à l’ouest, en sens inverse de l’Oued-Sahel, l’Oued-Sebaou. Les cimes neigeuses du Djurdjura sont les plus hautes de l’Algérie; la plus élevée, le pic de Lella-Khedidja, se dresse à 2,308 mètres au-dessus du niveau de la Méditerranée. Dans la Petite Kabylie, la chaîne des Babors semble être le prolongement oriental du Djurdjura; ses deux principaux sommets, le Grand Babor et le Tababor se tiennent entre 1,960 et 1,970 mètres. Des cours d’eau de cette contrée, le plus important est l’Oued-Kèbir, qui est le Roummel de Constantine.

Dans Fa partie moyenne et par sa rive gauche, l’Oued-Kébir longe la montagne des Zouagha, où dominait de tout temps l’autorité des Ben-Azzeddine. Les chefs de cette puissante famille étaient, en 1848, deux frères, Mohammed et Bou-Ghenane, qui, depuis l’installation des Français à Mila, n’avaient pas cessé de prendre à leur égard une attitude équivoque. Il leur était souvent arrivé de molester les tribus soumises à la France. Au mois d’août, le général Herbillon, commandant la province de Constantine, fit marcher contre eux une colonne de 1,300 hommes, sous les ordres du colonel Jamin. La résistance de ces Kabyles fut assez vive et assez prolongée pour que le général crût devoir se porter avec des renforts sur le théâtre des opérations. Les affaires du 8 et du 9 septembre furent décisives. Les deux Ben-Azzeddine firent leur soumission, payèrent une amende et parurent accepter si sincèrement la suprématie