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supplémentaires ou extraordinaires : le ministre des finances, seul, a à sa disposition la modeste somme de 18,000 francs.

De vaines tentatives ont été faites, en France, pour arriver à la même fixité. L’article 7 de la loi de finances du 24 juillet 1843 prescrivait que l’organisation centrale de chaque ministère serait réglée par une ordonnance royale insérée au Bulletin des lois, et qu’aucune modification ne pourrait y être apportée que sous la même forme et avec la même publicité. Cet article, en nécessitant, dans les deux cas, l’intervention du conseil d’état, mettait d’incontestables entraves à l’arbitraire ministériel. Quelques ministres s’exécutèrent, mais la révolution de février et les événemens qui en furent la conséquence mirent à néant tout ce qui s’était fait. Sous l’empire, les ministres s’en tinrent à de simples arrêtés ministériels pour se soustraire à l’intervention du conseil d’état, et comme aucun ministre ne se considérait comme lié par les règlemens de ses prédécesseurs, les variations continuèrent d’être fréquentes et de se traduire presque toujours par des accroissemens de dépense. Le corps législatif se préoccupa d’assurer, enfin, aux administrations centrales la-stabilité qui leur manquait, et, en 1870, la commission du budget inséra dans la loi de finances de 1871 un article portant qu’avant le 1er janvier 1872 « l’organisation de chaque ministère serait réglée par un décret rendu dans la forme des règlemens d’administration publique et inséré au Journal officiel, et ne pourrait être ultérieurement modifiée que dans les mêmes conditions de forme et de publicité. »

La guerre vint mettre un obstacle insurmontable à l’exécution immédiate de cat article de loi, et les ministres du régime actuel n’ont en garde d’y donner aucune suite. Les cadres administratifs ont subi le contre-coup de la mobilité ministérielle et de la hâte qu’éprouvait chaque ministre de profiter de son court passage aux affaires pour pourvoir ses proches ou ses protégés. Quand l’heure des économies nécessaires a sonné, la commission du budget n’a pu s’empêcher de reconnaître et de signaler un abus aussi manifeste. « Il dépend d’un ministre qui arrive, écrivait en 1882 le rapporteur-général, de changer par un simple décret l’organisation des services, de créer ou de supprimer des directions, d’augmenter le nombre des employés, de modifier le chiffre des traitemens. Il serait temps de mettre fin à ces abus. Les administrations centrales doivent, comme tous les services dépendant des ministères, être organisées d’une manière permanente. » En conséquence, la commission reprit et inséra, dans la loi de finances de 1883, le texte même de l’article de 1870, en fixant au 1er janvier 1884 la date à laquelle tous les décrets d’organisation devaient avoir paru au Journal officiel.