Page:Revue des Deux Mondes - 1887 - tome 82.djvu/181

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en Lorraine, en Franche-Comté et ailleurs, ont été attribués avec beaucoup de vraisemblance à l’arrivée de sources gazeuses, où le fer était dissous à l’état de bicarbonate. La forme de globules à couches concentriques ou pisolithes qu’ils affectent rappelle, d’une manière frappante, les petits sphéroïdes de chaux carbonatée déposés chaque jour dans le bassin où jaillissent et tourbillonnent les sources thermales de Carlsbad. Parfois on reconnaît clairement que les dissolutions de peroxyde de fer ont agi sur le calcaire qu’elles baignaient ; car elles l’ont graduellement corrodé. Leur action chimique s’est exercée aussi sur les matières organiques, animales et végétales. En plusieurs points de l’Alsace, le minerai contient des fragmens menus et fibreux consistant en débris ligneux, où le bois, sans perdre sa texture, a été complètement remplacé par du peroxyde de fer et du quartz.

Rien de plus clair que l’intervention d’eaux souterraines dans l’origine de beaucoup d’amas de calamine, dont le zinc se trouve à l’état de carbonate et de silicate hydraté, par exemple à la Vieille-Montagne, non loin d’Aix-la-Chapelle. Les travaux d’exploitation ont permis de reconnaître et de suivre dans tous leurs détails les canaux d’ascension des sources génératrices. Les parois calcaires entre lesquelles elles cheminaient ont été attaquées, et, de même que nous venons de le voir pour le peroxyde de fer, le minerai de zinc s’est substitué peu à peu au carbonate de chaux. Les sources qui tenaient le métal en dissolution sortaient de failles ; elles se sont insinuées dans les couches perméables, en coulant à la surface des couches imperméables. Des vestiges de coquilles fossiles que renferment parfois les minerais de zinc et de plomb, en Westphalie, par exemple, attestent également k substitution des combinaisons métalliques au calcaire. Les mines de plomb et d’argent du Laurium, l’une des principales richesses des Athéniens, et qui, dès l’an 520 avant notre ère, figurent dans leur budget, ont révélé, par leurs vastes excavations, peut-être avec plus d’évidence encore, les mêmes procédés de la nature.

Des faits semblables se retrouvent dans beaucoup d’autres contrées. Citons en France divers gîtes calaminaires sur le pourtour du Plateau central, particulièrement dans le Gard et l’Hérault ; et aux États-Unis, dans les Montagnes-Piocheuses, les gisemens importans qui ont donné naissance aux deux villes d’Eureka et de Leadville. Malgré des différences locales, tous ces amas de calamine présentent des analogies frappantes et tout à fait indépendantes de l’âge des couches dans lesquelles ils se sont épanchés. Toujours les nappes métalliques sont en rapport de situation avec la perméabilité et la nature chimique des roches, exactement comme elles le seraient