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hors du bois des Oliviers et mit fin à la lutte ; dans l’après-midi, tout le corps d’armée bivouaqua aux environs du col. Les nombreux blessés, — il n’y en avait pas moins de trois cent quatre-vingts, — furent transportés à l’ambulance de Haouch-Mouzaïa, et, le lendemain, de l’ambulance à l’hôpital de Blida. La cavalerie qui les avait escortés ramena, au retour, un convoi énorme destiné au ravitaillement de Médéa et de Miliana.

Le 19 juin, à huit heures du matin, des berges ombragées du lac de Mouzaïa, sous le couvert des chênes, la première brigade au repos voyait serpenter au-dessous d’elle, par toutes les sinuosités de la route, la file interminable des mulets chargés qui remontaient lentement au col ; à l’ombre, le colonel Changarnier attendait le moment de faire prendre les armes aux bataillons d’escorte, lorsqu’un officier d’ordonnance vint, comme dans la matinée du 15, le chercher de la part du maréchal. Il le trouva préoccupé, soucieux; les généraux et la plupart des colonels étaient venus lui représenter qu’il était urgent de ménager les effectifs réduits, harassés de marches et de combats, épuisés surtout par l’ardeur d’un soleil implacable, et que de nouvelles opérations, en présence d’un ennemi acharné, nombreux, fait au climat, pourraient avoir un échec, sinon un désastre, pour conséquence. D’autre part, pour approvisionner du nécessaire Médéa, Miliana surtout, ces opérations, jugées si périlleuses, n’en étaient pas moins indispensables. C’était sur ce dilemme embarrassant que le maréchal avait voulu consulter le colonel du 2e léger. Toujours prêt à l’action, Changarnier opina sans hésitation pour une expédition sans retard. Revenu à sa brigade, dès que les derniers mulets du convoi eurent défilé, il la mit en marche. Le soir, à quatre heures, au bivouac du bois des Oliviers, le maréchal le fit appeler derechef : « Votre opinion, lui dit-il, est-elle toujours la même? — La réflexion l’a confirmée. Vous avez encore assez de troupes pour passer partout, et si Abd-el-Kader veut vous barrer le chemin, vous le battrez. — Mon estomac et mes entrailles m’ennuient; je serai obligé de rester à Médéa pour régler le système de fortification que Duvivier veut trop étendre. — Nous vous regretterons, monsieur le maréchal ; mais nous seconderons si énergiquement le général Schramm que... — Est-ce que je pense à lui? C’est vous qui commanderez. C’est vous qui comprenez ce qu’il faut faire ; c’est vous qui avez la résolution nécessaire; c’est vous qui commanderez. » Et, laissant le colonel ravi, mais stupéfait, le maréchal rentra dans sa tente.

Le 20 juin, les troupes étaient de bonne heure sous les mars de Médéa. Depuis l’occupation, la ville n’avait pas subi d’attaques sérieuses ; les pertes de la garnison n’étaient que de quatre tués et