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rend chez son père et sa mère, accompagnée de tous les parens et amis. Au seuil de la porte, elle est reçue par sa mère, qui, après lui avoir offert un plat de riz, brise un œuf et une noix de coco. En entrant, elle pose le pied droit le premier, puis se dirige vers la chambre où elle espère être délivrée. Elle prend une lumière, un verre d’eau et fait sept fois le tour de la chambre en l’aspergeant chaque fois. C’est pour obtenir que l’enfant qui va naître ne soit jamais privé de la clarté du soleil et ne manque jamais d’eau. Quand le grand jour est arrivé, des présens sont de nouveau échangés entre tous les parens, et sur le lit de l’accouchée sont déposés, comme d’heureux présages, un peu d’argent et quelques poignées de riz.

Après son accouchement, la femme parse est considérée comme impure durant quarante jours, et, pendant tout ce temps, elle ne peut absolument toucher que son lit et le berceau de son enfant. Ni son mari, ni aucun membre de sa famille ne s’exposent à entrer en contact avec elle. Elle est privée des tapis ou des nattes qui décorent habituellement sa chambre, et, si elle marche, c’est sur le parquet nu. Ce qu’il y a de pis, c’est que la chambre de l’accouchée est close, sans air, juste au moment où elle en a le plus besoin. Ceux qui ont vécu sous la chaude latitude de Bombay peuvent seuls se faire une idée du supplice de la mère. Qu’une femme parse et pauvre tombe sérieusement malade dans de telles circonstances, elle est à peu près perdue, ainsi que son enfant. Si c’est une femme riche, le médecin européen qui la visite sera tenu à distance par la famille de l’accouchée, et le chef de la maison lui refusera sa main, le shake-hand si commun chez les Anglais.

Une autre coutume non moins singulière a lieu le sixième jour de la naissance. Auprès du lit de la mère sont placés une feuille de papier blanc et un crayon ; c’est avec cela que le Génie qui doit présider aux destinées de l’enfant écrira son pronostic. Naturellement, on n’y découvre rien, mais on se console en disant que l’écriture est invisible aux mortels et que le livre de l’avenir doit être fermé. Pourtant le mystère sera éclairci, et c’est un astrologue qui s’en chargera. On éloigne les importuns, et le devin reste seul, entouré des femmes de la maison. Il demande l’heure exacte à laquelle l’enfant est venu au monde, et, selon la réponse, il trace à la craie, sur une table qui est devant lui, une quantité innombrable de figures et d’étoiles. Puis il prescrit les noms que l’enfant doit porter, noms qui ont rapport à l’étoile sous l’influence de laquelle s’est faite la naissance. Presque toujours il prédit une longue et heureuse vie au nouveau-né, et cela se paie 10 à 12 francs. Les devins ou joshis ont une grande connaissance