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réorganisation énergique des finances nationales. Tout le reste n’est qu’expédient ou ruineuse chimère.

Le moment, il faut en convenir, n’est pas trop favorable pour les pays de régime parlementaire. Pendant que le ministère anglais en est toujours à se débattre contre l’agitation irlandaise, qu’il ne peut ni apaiser ni réprimer, dont il ne peut pas même faire condamner les chefs, le ministère italien en est encore à prendre une figure et un nom. L’œuvre, à vrai dire, semble singulièrement laborieuse. Depuis que le dernier cabinet, présidé par M. Depretis, a cru devoir donner sa démission sous le coup de cette malheureuse affaire de Massouah, si justement pénible au patriotisme italien, et du vote parlementaire qui en a été la suite, les négociations ont passé par une série de péripéties intimes sans arriver à un dénoûment ; elles ont l’air de tourner sur elles-mêmes. Vainement le roi Humbert, en vrai souverain constitutionnel, a tour à tour appelé auprès de lui tous les personnages publics, les présidens des deux chambres, ceux qui étaient ministres hier et ceux qui ne demanderaient pas mieux que d’être les ministres de demain, les chefs de partis et de groupes : il n’est encore rien sorti de toutes ces consultations du Quirinal. Un instant, il est vrai, M. Depretis a paru avoir réussi à reconstituer son cabinet avec M. de Robilant, avec M. Magliani, M. Saracco et quelques membres nouveaux. On croyait déjà tout arrangé, tout décidé, lorsque tout s’est de nouveau disloqué, et le problème ministériel est redevenu plus difficile que jamais, d’autant plus qu’au bout de toutes les combinaisons il y a une dissolution éventuelle de la chambre, que le roi semble juger dangereuse ou inopportune dans les circonstances présentes. Au demeurant, les combinaisons possibles, vraisemblables, se réduisent à deux ou trois. Les chefs des diverses nuances de la gauche, M. Crispi, M. Nicotera, M. Cairoli, seraient certainement tout prêts à reprendre le pouvoir, si on le leur offrait ; à l’extrémité opposée de droite, M. de Hobilant est visiblement le candidat préféré du roi, tout au moins comme ministre des affaires étrangères. Entre les deux camps, M. Depretis, le vieux et rusé tacticien, qui depuis longtemps ne sort des cabinets que pour y rentrer aussitôt, reste toujours la grande ressource. Mais, dans tous les cas, quel que soit le ministère qui se forme, il rencontrera plus ou moins les mêmes difficultés parlementaires dans une chambre où les anciens partis sont décomposés, où ni la droite, ni la gauche, ni le centre n’ont une majorité, où rien, en un mot, n’est possible que par des alliances et des transactions auxquelles l’esprit italien se prête, d’ailleurs, toujours aisément.

Ce qui complique tout visiblement, c’est une considération de politique extérieure, c’est la question du renouvellement de l’alliance de l’Italie avec l’Allemagne et avec l’Autriche, que le ministre des affaires