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PSYCHOLOGIE D’UNE SAINTE

SAINTE THERESE.

I. Œuvres complètes de sainte Thérèse. — II. Histoire de sainte Thérèse. Paris, 1883; Bray et Retaux.

L’idée que l’on se fait d’un saint a subi dans notre siècle la fortune de beaucoup d’autres idées : elle s’est affadie. Le côté héroïque et quelquefois aventureux du type s’est effacé, et le public en est venu à se représenter un homme bon à canoniser comme un être parfait, bien qu’un peu béat, absorbé dans ses dévotions, ne péchant jamais, mélancolique et, pour tout dire, très ennuyeux. Lorsque, par hasard, la vieille et forte race ressuscite, on ne la reconnaît plus. Nous en avons eu l’exemple, de notre temps, avec Gordon. Le monde a salué Gordon héros ; mais, parce que Gordon était violent, enclin à pendre ou à fusiller le méchant, le monde n’a point vu son air de famille avec les saints d’autrefois. Ce n’était pas un saint correct et, sans la correction, il est bien difficile d’arriver à quelque chose au XIXe siècle.

Il y a eu une époque, et un pays, où l’ancien type des élus de Dieu a eu tout son relief et tout son éclat. C’est l’Espagne, au XVIe siècle. La piété douceâtre et sage à laquelle nous sommes arrivés n’était point du tout le fait des contemporains de don Quichotte. Il y avait alors en Espagne, parmi les personnages des deux