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18 officiers, dont 2 indigènes, de 360 soldats, dont 222 indigènes. Elle comprenait 80 chevaux, 63 mulets, 300 ânes. Les combattans se décomposaient en 49 artilleurs qui servaient 4 obusiers, 78 ouvriers d’artillerie, 22 spahis sénégaliens, 209 tirailleurs. C’était une bien petite armée, et il s’agissait d’affronter un empire.

Le commandant de la colonne eut à faire preuve, dès le début, d’une énergie remarquable : les eaux du fleuve avaient baissé prématurément, et il fallut traîner à la corde une partie des embarcations ; une épidémie de fièvre typhoïde, d’ailleurs apportée du bas fleuve, se déclara dans les troupes qu’il avait concentrées à Médine ; le colonel lui-même fut retenu par la maladie à Saldé et ne reprit le commandement que le 11 décembre. On aurait pu tirer de ces débuts un fâcheux pronostic. Le capitaine Marchi écrivait au colonel : « Vous arriverez à Kita avec vos officiers et vos noirs, mais vos soldats blancs resteront le long de la route. » Le colonel lui répondit : « Je vous donne rendez-vous à Kita, et nous y serons tous, ou à très peu près, nègres et blancs : je vous en réponds. » L’événement lui donna raison.

En route, on eut d’abord maille à partir avec le village de Foukhara, à qui l’on reprochait de mauvais procédés à l’égard de la mission topographique. Le colonel somma le chef de comparaître : sur son refus, le village fut bombardé et incendié. La soumission fut immédiate, et, depuis lors, Foukhara a donné à tous l’exemple de la soumission. Dans le pays de Kita, on avait à construire la nouvelle forteresse. Nos alliés de Makandiambougou étaient toujours aux prises avec les pillards du tata de Goubanko. Ceux-ci étaient, dans le rayon de la forteresse, un dangereux voisinage. Pourtant le colonel leur fit porter des paroles pacifiques ; interprétées comme une marque de faiblesse, on y répondit par un défi. En outre, le mauvais exemple gagnait les villages voisins, qui n’envoyaient ni les travailleurs, ni les vivres promis, bien que journées d’hommes et charges de mil fussent régulièrement payées. Enfin, on annonçait l’arrivée prochaine d’une armée du Bélédougou, et cela mettait tout le pays en rumeur. Il fallait couper court à cette agitation.

Le 9 février, le colonel somma le chef de Goubanko de se rendre à Kita. La journée du 10 se passa sans réponse. Le 11, à quatre heures du matin, la colonne, composée de 308 hommes, se mettait en marche et, à neuf heures du matin, arrivait en vue de Goubanko. Ce tata était entouré d’une épaisse muraille d’argile ferrugineuse et très dure ; l’enceinte avait la forme d’un rectangle, avec des saillies formant bastions, des portes fortifiées, des créneaux, une plate-forme de tir, des fossés profonds. A l’intérieur, d’autres murailles faisaient de la forteresse trois forteresses. Goubanko avait résisté