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188,000 hommes et de 3,000 canons ; mais la valeur militaire de ces troupes ne correspond pas à leur nombre. Les principautés mahrattes, dont la soumission a coûté dix-huit années d’efforts à l’ancienne compagnie des Indes, sont toutes de peu d’étendue ; elles ont ensemble un peu moins de 7 millions d’habitans ; elles entretiennent sous les armes 60,000 hommes avec 110 canons ; mais comme c’est une race guerrière, organisée en clans, où tout le monde est prêt à marcher à l’appel du chef, le nombre des combattans pourrait être aisément doublé. Les états mahométans, dont les dispositions sont les moins sûres, ont une population de près de 15 millions d’âmes, n’ont guère que 75,000 hommes sous les armes ; mais leur artillerie a été l’objet de soins tout particuliers : elle ne compte pas moins de 800 pièces. Il est évident que les souverains de ces états n’ont voulu que former des cadres qui seraient remplis par une levée en masse des hommes valides. Il en est qui ont adopté le système prussien : ils ne gardent les recrues que deux et trois ans sous les drapeaux, et quand leur instruction est jugée suffisante, ils les font passer dans la réserve pour les remplacer par un nouveau contingent. L’effectif de leurs troupes en service est donc loin de représenter le nombre d’hommes qu’ils pourraient mettre sous les armes. On trouve dans les corps permanens à la solde de ces princes des Afghans, des Arabes et même des noirs, mais tous sont musulmans.

Deux états méritent une mention particulière parce que, placés à l’extrême frontière de l’Hindoustan, ils doivent à cette position une plus grande liberté d’action. C’est d’abord l’état de Cachemyr, fondé par un des lieutenans de Runjeet Singh, Ghoulab Singh, et demeuré dans la famille du fondateur. Cet état est une ancienne dépendance de l’Afghanistan, auquel il payait tribut au temps de la puissance des souverains de Caboul : on évalue sa population à 1 million et demi d’habitans, presque tous musulmans et d’origine afghane ; la classe dominante seule est de race sikhe, comme le souverain. L’armée est forte de 27,000 hommes avec 100 canons. Le maharajah de Cachemyr détient une des passes qui conduisent dans l’Afghanistan, et c’est en empruntant son territoire que, dans la dernière guerre, une partie des forces anglaises s’avança contre Caboul.

Le Népaul, enfermé dans de hautes montagnes, sépare l’Inde anglaise du Thibet et de la Chine, avec laquelle il a été plusieurs fois en guerre. Son souverain, ou plutôt le premier ministre de celui-ci, sir Jung Bahadour, qui gouvernait sous le nom de son maître, s’est toujours montré l’ami fidèle des Anglais. Lors de la rébellion, l’armée du Népaul fut envoyée au secours des troupes anglaises et contribua utilement à la prise de Delhi et à la soumission du