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populations orthodoxes furent invitées à payer régulièrement les taxes pour les vladikas. En général, les vues des orthodoxes parurent acceptables. On crut devoir néanmoins les soumettre à un mûr examen. Cela prit naturellement du temps, et il en résulta qu’aucun changement ne fut, au début, apporté au statu quo. On modifia seulement, dès l’année 1880, la désignation officielle du culte orthodoxe : les adeptes de ce culte, manifestant leur aversion pour le nom de grecs ou de grecs orthodoxes et voulant être appelés tout simplement serbes ou pravoslani (orthodoxes), il fut décidé qu’on les nommerait officiellement orientaux-orthodoxes ou simplement orthodoxes. Cette expression indique, en effet, la religion sans qu’on y mêle aucune dénomination nationale.

Ceux qui firent le moins de bruit, ce furent encore les catholiques. Ils n’avaient d’autres représentans autorisés à parler pour eux que les franciscains. Ceux-ci bornèrent provisoirement leurs vœux à la construction de nouvelles églises avec des subventions de l’état, à la reconnaissance de leurs privilèges, et spécialement à l’affranchissement des impôts, qui leur fut, en effet, accordée en 1880 pour les biens qu’ils possédaient avant l’occupation. Mais une réforme fondamentale de la hiérarchie, pour l’église catholique, fut réclamée d’un autre côté. C’est à Rome qu’on y pensa ; la curie romaine en fit formellement la proposition. Depuis longtemps, la congrégation de la Propagande, à Rome, était mécontente de la façon d’être du catholicisme en Bosnie. Sans doute, elle ne méconnaissait pas les grands services qu’avaient rendus les franciscains pour le maintien du catholicisme dans ces contrées ; mais elle désirait que le clergé bosniaque et herzégovinien parvint à un degré d’instruction plus en rapport avec celui des ecclésiastiques dans tout le reste de l’Europe. Elle trouvait aussi que les relations entre l’ordre des franciscains et le saint-siège avaient besoin d’être quelque peu resserrées, afin d’éviter à l’avenir les conflits contre lesquels le vicaire apostolique avait eu à lutter dans le passé. Pour y parvenir, la Propagande ne croyait pas qu’il y eût de meilleur remède que de séculariser la hiérarchie catholique en Herzégovine et Bosnie. L’occupation du pays par l’Autriche-Hongrie lui paraissait offrir une occasion favorable à cette entreprise. Le gouvernement impérial ne tarda pas à examiner la question. Mais cet examen même le convainquit que l’administration catholique dans les provinces occupées ne présentait pas des inconvéniens assez graves pour justifier la pleine et entière sécularisation de la hiérarchie catholique. Il désirait ne pas porter atteinte à l’ordre des franciscains, car il attachait un grand prix à la coopération de ces religieux, si influens sur la population et si franchement