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montagneux du pays. Pour montrer quelle induction on peut tirer de cette structure, quelques développemens sont nécessaires.

Dans des pays entiers, les couches qui forment une partie notable de l’épaisseur de l’écorce terrestre, anciens sédimens de la mer, sont restées tout à fait ou presque horizontales, ainsi qu’elles avaient été déposées. C’est ce qu’on observe dans le nord de la France, pour des couches qui sont superposées les unes aux autres sur plus de 1,000 mètres d’épaisseur. Il ne s’agit pas seulement ici des dépôts les plus récens, dits tertiaires, mais aussi des couches plus anciennes, nommées crétacées et jurassiques, qui les supportent. Dans d’autres pays, au contraire, et sur des étendues considérables, les couches correspondantes sont redressées, ployées et contournées de diverses manières ; elles ont subi ces dislocations sur des épaisseurs énormes, atteignant souvent plusieurs milliers de mètres. A chaque pas, dans les Alpes, par exemple, lorsqu’on se trouve en présence de ces escarpemens où la roche se montre à vif, l’œil le moins observateur est rendu attentif par la hardiesse des inflexions des couches, et l’esprit se reporte avec stupéfaction vers la grandeur des forces qui ont produit de tels effets ; car il est hors de doute que toutes ces couches, qui furent jadis horizontales, ont été plus ou moins fortement dérangées de leur position première. Formées par dépôt à un niveau inférieur à celui de la mer actuelle, elles ont été portées dans le majestueux massif de la Jungfrau, par exemple, au-delà de 3,000 mètres de hauteur, bien au-dessus de la limite des glaciers. De tels redressemens et ploiemens n’ont pu s’opérer dans des masses solides, sans être accompagnées de nombreuses et importantes fractures. Les principales, que l’on nomme failles, sont à peu près verticales. Elles affleurent et coupent la surface du sol parfois sur des dizaines et des centaines de kilomètres, et dans le sens de la profondeur, elles sont indéfinies, c’est-à-dire qu’elles descendent au-delà des parties où il nous est possible de pénétrer. Lorsque ces failles se sont produites, leurs deux parois se sont respectivement déplacées et ont frotté énergiquement l’une contre l’autre : de vastes surfaces rocheuses se sont ainsi burinées, striées et polies, d’où leur nom de miroir en langage de mineurs.

Ce n’est pas seulement dans les chaînes de montagnes que de tels faits se manifestent. Il est des contrées qui ne présentent aujourd’hui que d’assez faibles proéminences et qui ont cependant éprouvé les mêmes actions, dans toute l’épaisseur de leurs couches constitutives. Nulle part, ce singulier désaccord n’est mieux mis en évidence que par les travaux de mines exécutés dans la longue bande de terrain houiller, recouverte et cachée par des couches plus récentes, qui s’étend du nord de la France à travers la Belgique jusqu’en Westphalie. Sur plusieurs milliers de mètres, les