Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 66.djvu/621

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pétrole à l’état solide, qui provenant, à l’état de vapeurs, des abîmes souterrains, s’est imprégné dans les fissures de la roche calcaire. Il suffit, en effet, de distiller celle-ci pour l’en séparer. Les roches asphaltiques se rencontrent surtout dans le Syracusain près de Raguza, où se trouve un vaste plateau appelé Rinazza ou contracta a pece (contrée à poix), dont on exploite la pierre en la sciant pour en faire des chambranles de cheminées, des montans de portes, des marches d’escalier. Elle se sculpte et se taille très facilement, mais, quand elle renferme une trop grande proportion d’asphalte, elle empâte la scie ; il faut alors la faire suer, c’est-à-dire l’exposer au feu, pour la débarrasser de son excédent de matière bitumineuse. Appartenant à la formation miocène, ces roches se présentent en amas puissans, au milieu de la molasse, ce qui prouve que le pétrole s’y est déposé au moment même où ce terrain s’est formé. M. Coquand évalue à 1 milliard 91 millions de kilogrammes la quantité d’huile minérale qu’on pourrait tirer de cette région et dont l’exploitation a été complètement négligée jusqu’ici. Une autre source de pétrole a été récemment découverte à Lercara, près de Termini.

Les gisemens de gypse, de sel gemme et de soufre appartiennent également à l’étage miocène de la formation tertiaire. Si les deux premiers de ces produits sont encore à peu près inexploités, il n’en est pas de même du dernier, qui est la principale richesse minérale de la Sicile et qu’on n’a jusqu’ici rencontré à l’état natif dans aucun autre pays. Les gisemens de soufre forment des espèces de poches ou dépôts, aujourd’hui séparés les uns des autres, mais qui ont dû autrefois constituer des couches continues ; elles ont été recouvertes depuis, sur quelques points par les terrains quaternaires ou enlevées sur d’autres par quelque débâcle. Ces poches sont disséminées dans les terrains gypseux qui occupent, dans la partie centrale, autour de Caltanisetta, environ le quart de la superficie de l’île. On a beaucoup discuté sur l’origine de la production du soufre ; les uns l’ont attribuée à des émanations de vapeurs sulfureuses survenues dans, le miocène supérieur ; d’autres à la décomposition du sulfure de : chaux par la chaleur des laves bouillonnantes, au sein de la terre : quoi qu’il en soit, ces dépôts n’ont rien de commun avec les phénomènes volcaniques actuels, et, comme les gypses des environs de Paris, ne sont que des accidens dans les terrains tertiaires.

Le soufre existe parfois à l’état cristallin dans la masse gypseuse, mais le plus souvent on le trouve formant des couches plus ou moins épaisses, plus ou moins inclinées, au milieu des schistes marneux ou calcaires, entourées d’une gangue de même nature. M. Kuhlmann fils a fait des soufrières de la Sicile une étude dont