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dans les bureaux plutôt que dans cette Revue : cependant, il est impossible de ne pas y toucher en passant.

Le Conservatoire, s’il n’a pas de système d’enseignement, a un système de concours : c’est même en quoi consiste, à la bien regarder, toute son organisation. En octobre, les nouveau-venus concourent pour être élèves; en janvier, les élèves concourent pour des pensions; en juin, pour être admis au concours de fin d’année; ici enfin, pour des prix et des accessits. Sur la première de ces épreuves je n’ai rien à dire, sinon que ce doit être un examen, plutôt qu’à proprement parler un concours ; examen tout élémentaire et qui ne sacrifie aucune des chances de l’avenir. Il est certain que tout Français de l’un ou l’autre sexe, que tout étranger ânonnant notre langue ne peut pas être admis de droit à encombrer les classes du Conservatoire ; mais il est bien difficile de prononcer, après une seule expérience, qu’un jeune homme ou une jeune fille qui ne sait rien sera propre ou impropre à la scène; il est fâcheux de repousser dans les ténèbres extérieures ceux qui peut-être, après six mois de leçons, se seraient montrés dignes de la lumière : je ne saurais m’associer au vœu de MM. de Leymarie et Bernheim, qui demandent qu’on décourage du premier coup un plus grand nombre d’aspirans au théâtre. En revanche, je verrais avec plaisir, comme eux, qu’on supprimât le « concours des pensions, » et cependant je souhaiterais que l’on grossît la somme départie à ce chapitre. Le jury décerne ces pensions tantôt au mérite, tantôt à la pauvreté; dans le premier cas, c’est une récompense qui risque d’être inutile et, par sa nature, scandaleuse : — la toilette de telle ingénue témoigne assez qu’elle n’a que faire des deniers de l’état; — dans le second, l’enquête préalable est bien délicate, et concerne des administrateurs plutôt que des jurés. Chacune de ces pensions est de six cents francs seulement, et l’on n’en donne guère que deux à chacune des classes : c’est une somme de 4,800 francs allouée, chaque année, au Conservatoire ; il est malaisé de ne pas la déclarer ridicule. Qu’on l’augmente et qu’on laisse à l’administration le soin de la distribuer selon les besoins reconnus des élèves; qu’on supprime le concours de janvier.

Le concours de juin, ce concours d’admissibilité à celui de fin d’année, ne se justifie par aucune raison. Qu’à cette époque, ou, si l’on veut, un peu plus tôt, — vers Pâques, par exemple, — les professeurs désignent les élèves qui se présenteront en juillet devant le jury; qu’ils les désignent d’après toutes les notes de l’année, d’après les résultats actuellement manifestes, enfin d’après leur jugement personnel et même leurs prévisions; un pareil choix sera plus sûr que celui des jurés ; et, si le concours devant un public plus ou moins restreint offre en matière de théâtre des avantages qu’il est superflu d’expliquer, celui de fin d’année suffira. Qu’au moment où les professeurs tirent des rangs ces candidats, ils marquent, d’autre part, les élèves qui