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de consistance et d’éclat. Un chauffage à 350 degrés, en vase clos, transforma la silice gélatineuse en petits cristaux couverts de facettes brillantes, identiques, par leur forme et par leurs propriétés optiques, à ceux de la nature. Cette découverte est un fait capital dans l’histoire des synthèses minérales; son importance au point de vue géologique est telle qu’aujourd’hui encore elle fait pâlir les plus beaux travaux synthétiques, et, à l’époque de sa publication, c’est elle qui, malgré les mérites incontestés d’Ebelmen, assura le triomphe de son heureux rival.

Dans le même temps, la méthode inaugurée par Gay-Lussac fut reprise avec succès par Durocher et par M. Daubrée. Guidés l’un et l’autre par l’observation des phénomènes géologiques, ces deux savans fournirent, pour ainsi dire, la preuve palpable des moyens employés par la nature dans quelques-unes de ses œuvres les plus complexes. Durocher mit en relief certaines actions que peut exercer à haute température l’hydrogène sulfuré, gaz que les canaux souterrains transportent fréquemment et amènent à la surface du sol. En le faisant réagir au rouge sur les chlorures de divers métaux, il produisit des sulfures remarquablement cristallisés.

M. Daubrée décomposa par la vapeur d’eau, dans les mêmes conditions, certains chlorures volatils, et comme résultat obtint des oxydes en cristaux d’une netteté et d’une pureté parfaites. Parmi les reproductions artificielles qu’il effectua en se servant de cette méthode, il faut surtout citer celle de l’acide stannique. Ce corps, connu des minéralogistes sous le nom de cassitérite, est le minerai d’étain le plus répandu; il a donc, à ce titre, une importance métallurgique considérable. On ne le rencontre en filons que dans des terrains très anciens; comment y avait-il pris naissance? Quels agens l’y avaient déposé? Les observations des géologues répondaient déjà qu’il y provenait d’une destruction de composés volatils, mais l’expérience pouvait seule trancher la question. Habilement exécutée, elle a résolu complètement cet intéressant problème géologique.

On doit aussi à M. Daubrée des perfectionnemens notables apportés à la méthode de Sénarmont pour les reproductions par voie humide en vase clos à haute température. Il a su pousser le chauffage des tubes jusqu’à 700 degrés. Dans ces conditions, le verre subit d’étranges altérations; il perd sa transparence, se gonfle et se transforme en un agrégat de cristaux. Non-seulement du quartz se forme en abondance, mais, si le verre renferme du fer et de la magnésie dans sa constitution, on voit apparaître des petits cristaux verdâtres de pyroxène. Ce minéral peut donc avoir une double origine; Berthier l’avait reproduit par voie sèche; l’expérience de