Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 42.djvu/332

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aujourd’hui le centre et l’aile gauche. La grosse phalange des Suisses forma à Dreux le centre de l’armée royale ; elle avait à sa droite une aile très forte, composée de gendarmes, d’Espagnols, de Gascons, de lansquenets ; à gauche, les enseignes picardes et bretonnes ; Montmorency se tenait avec ses gendarmes à la gauche des Suisses, entre son centre et son aile gauche.

Vingt enseignes suisses formaient deux rectangles qui avaient chacun quatre-vingts hommes de front et trente-six hommes de profondeur, reliés par les deux autres enseignes. L’armée royale étant en bataille marcha contre celle de Condé qui lui montrait le flanc ; et dans ce mouvement général, il arriva que la « bataille » se trouva très en avant de l’aile droite ; aussi reçut-elle le premier choc des huguenots. La bataille de l’armée huguenote se composait de 450 hommes de grosse cavalerie, de 6 cornettes de cavaliers allemands, de 6 enseignes allemandes et 12 enseignes françaises. L’avant-garde, commandée par Coligny, comprenait 350 cavaliers français, 4 cornettes de cavalerie allemande, 6 enseignes allemandes et 2 françaises. Pour le combat, on avait séparé l’infanterie huguenote en deux masses, l’une allemande à la gauche, l’autre française à la droite ; on avait fait aussi deux grosses masses de cavalerie, l’une au centre commandée par Condé, l’autre à la droite commandée par Coligny. Il était une heure quand la bataille s’engagea. Les Suisses, comme de coutume, se mirent à genoux et les bras étendus appelèrent à haute voix le secours de Jésus-Christ et de la vierge Marie ; leur prière était courte : ils imploraient le ciel « de leur donner la victoire pour conserver les vraies églises apostoliques et aussi pour que quelque honneur pût en rejaillir sur leur chère patrie. » A peine relevés, ils avancèrent rapidement contre les hommes de pied allemands ; en marchant ils se trouvèrent la droite en l’air, sans lien avec le reste de l’armée royale. C’est à ce moment qu’ils reçurent l’attaque du prince de Condé, qui se jeta sur l’aile découverte des Suisses : « Mouy et d’Avaray, écrit le duc d’Aumale, les attaquent de front ; lui-même les prend à revers. La phalange est traversée, le prince court alors à ses reîtres et les divise en deux corps. Il lance les uns sur cette trouée vivante où lui-même vient d’ouvrir une large brèche ; les longs pistolets des Allemands achèvent l’œuvre de destruction commencée par la furia francese. Il oppose les autres à Damville et à d’Aumale, qui viennent au secours des Suisses. » Peu après la charge de Condé sur les Suisses, Coligny avec sa grosse cavalerie chargea les gendarmes du connétable et les sépara de l’aile gauche des Suisses. La Rochefoucauld avec une petite réserve attaqua la phalange de front. Les Suisses étaient seuls, les troupes qui devaient les flanquer avaient