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de son conseil, M. de Comberousse lui appartient depuis plus de trente ans; il a connu ses fondateurs et les plus éminens des élèves qu’elle a formés, il a contribué lui-même, par son enseignement, pour une large part à ses progrès. Aussi le livre qu’il nous a donné est-il à la fois nourri de faits, et rempli d’appréciations très fines et de réflexions qui frappent par leur justesse; il n’a rien de l’aridité qu’au premier abord semblerait comporter le sujet.

L’histoire de la fondation de l’École centrale des arts et manufactures a été retracée ici même par M. Charles Lavallée, au moment où elle venait d’ajouter à son programme l’enseignement de la science agricole[1]; c’est ce qui nous dispense de suivre M. de Comberousse dans les détails fort intéressans qu’il donne à ce sujet. Bornons-nous à rappeler en quelques mots les faits les plus importans. La création de l’École centrale a été l’œuvre d’un petit groupe d’hommes éminens dont un seul est encore sur la brèche : M. Dumas, l’illustre chimiste, qui était déjà à ce moment l’un des premiers professeurs de son temps. Il avait formé, avec Théodore Olivier et Eugène Péclet, le projet de fonder une école destinée à fournir les ingénieurs civils dont l’industrie privée avait besoin; on ne tarda pas à rencontrer dans M. Lavallée non-seulement un bailleur de fonds, mais un organisateur aussi intelligent qu’énergique et dévoué. M. Lavallée a dirigé l’École depuis sa fondation jusqu’en 1862, où il eut pour successeur M. Perdonnet. En 1857, quand le nombre des élèves était monté à 475, quand la prospérité de l’établissement ne laissait plus rien à désirer (le bénéfice net commençait à dépasser cette année-là 100,000 francs), M. Lavallée, refusant les offres brillantes d’une association d’anciens élèves de l’École, proposa de la céder gratuitement à l’état. C’était à ses yeux et aux yeux de ses collaborateurs le seul moyen d’assurer l’avenir de l’École centrale et de la maintenir au niveau d’un véritable établissement national.

La proposition de M. Lavallée, qui était, on peut le dire, un acte d’abnégation et de dévoûment à l’intérêt général, fut acceptée, et l’École centrale rentra dans les attributions du ministère de l’agriculture, du commerce et des travaux publics. Le gouvernement, en prenant possession de l’école, en respecta l’organisation intérieure et le mode d’enseignement; mais on profita de l’occasion pour réaliser quelques améliorations désirées depuis longtemps, parmi lesquelles la plus importante peut-être fut l’établissement d’un concours d’admission. Jusqu’alors, les examens d’entrée avaient été de simples examens d’admissibilité, sans classement ni concours réel; depuis 1859, les candidats passent devant un jury de concours nommé par le ministre. Une autre amélioration due au changement de régime de l’école fut le dédoublement

  1. Voyez la Revue du 15 mai 1872.