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des pharisiens d’un pinceau froid et chétif. Il y a toutefois à louer le groupe des pharisiens attroupés comme une meute furieuse autour de l’aveugle qui rase humblement la muraille. Leur physionomie colérique est d’ailleurs trop accentuée dans le caractère simiesque. Le Saint Joseph de M. Becker se distingue par la belle simplicité de l’ordonnance et le beau sentiment des figures. L’enfant Jésus, debout près d’un établi de menuisier, écoute avec une attention presque religieuse les leçons du saint, son maître en l’art de raboter les planches. Ce tableau est loin d’être peint avec la maestria de la figure de femme dont nous avons déjà parlé. Le Christ couché de M. Gaillard paraît en bois, et celui de M. Léon Perrault paraît en cire. Les bourreaux n’avaient pas besoin de tuer à coups de flèches le Saint Sébastien efflanqué de M. Léon Bourgeois ; il allait tout naturellement mourir d’anémie. Il y a d’ailleurs du sentiment dans la physionomie, et beaucoup de naturel et de grâce dans l’abandon de la pose. L’Adoration des Mages montre chez M. Bréham l’instinct et le souci de la couleur. Dans sa Résurrection de Lazare, d’une composition bien agencée, quoiqu’un peu confuse, et d’une coloration harmonieuse, mais trop sourde, M. Ch. Jadin témoigne d’une rare entente du clair-obscur. Le groupe du Christ et de la femme prosternée devant lui a de la grandeur. La Judith montrant aux Israélites de Béthulie la tête d’Holopherne, faiblement peinte, par M. François Grellet, est composée avec une certaine originalité. Dans les Apôtres au tombeau de la Vierge, peinture à la cire, M. Alexandre Grellet a trouvé des tons vifs et vigoureux. Le Saint Paul, de M. Ponsan, ne convaincra pas l’Aréopage par ses gestes emphatiques ; les Aréopagites avaient proscrit de leur tribunal ces faciles effets oratoires. Les Agapes, de M. Mazerolle, dont la disposition s’agence avec une science ingénieuse, s’effacent dans une gamme grise et terne. Nous ne disons un mot du Jésus ressuscitant la fille de Jaïre, de M. Cormon, que parce que ce peintre a eu un début très remarqué. Il faut se défier de ces débuts trop bruyans. La composition de la Fille de Jaïre est banale, l’exécution lâchée, la couleur terne, fausse et quelque peu fantastique. La vulgarité des têtes n’a d’égale que la pauvreté des gestes. Peinte dans une tonalité glauque, la scène semble se passer au fond d’un aquarium.


II

Les vers d’Hésiode qui chantent la naissance des muses et leur ascension dans l’Olympe ont inspiré à M. Ehrmann une belle page décorative pour le palais de la Légion-d’Honneur. Les figures plafonnent, la composition en hauteur s’agence heureusement, la