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Le projet du gouvernement égyptien comportait une émission nominale de 800 millions de francs, destinée à en procurer 600 effectifs, au cours de 75 francs pour 7 francs de rente, remboursables en trente ans et garantis par les revenus des chemins de fer, qui deviennent libres cette année même à la suite de l’amortissement de l’emprunt de 1866, par les rentrées de l’impôt personnel et indirect, par tous les excédans que pourra procurer l’amortissement des autres emprunts, enfin par les avances du mokabala, — on appelle ainsi l’anticipation demandée aux fellahs pendant le dernier trimestre de 1871 et depuis le commencement de 1872 sur six années de leurs taxes foncières, grâce à laquelle les sujets du khédive peuvent racheter une partie de la propriété foncière dont ils ne sont même pas les usufruitiers. Ces arrangemens ont produit 125 millions de francs en 1872, plus de 75 en 1873. Malgré les anticipations sur le paiement des six années, les exercices postérieurs recevront encore de ce chef un certain accroissement de recettes. L’emprunt de 1874 a été concédé à l’importante maison Oppenheim-Alberti à des conditions naturellement inférieures à celles de l’émission publique, mais la moitié seulement de l’emprunt a été souscrite par les concessionnaires et rétrocédée d’abord par eux à une réunion de capitalistes ou d’établissemens de crédit appelée à courir avec eux-mêmes les chances de gain ou de perte ; ce n’est que plus tard que le public a été appelé à y prendre part au cours de 82 fr. 50 cent, et pour la moitié seulement, soit pour les 300 millions effectifs pris ferme par les concessionnaires eux-mêmes, le surplus devant faire l’objet de négociations nouvelles.

Le succès de l’émission publique n’a pas répondu à l’attente du gouvernement égyptien. Malgré le haut cours du 7 pour 100, qui avait atteint 93 fr., les obligations émises à 421 fr. 85 c. pour 35 fr. de rente n’ont pas tardé à être l’objet d’une baisse persistante qui les a fait tomber un moment à 326 francs au plus bas ; elles sont remontées récemment à près de 400 francs. Les concessionnaires, pressés par le vice-roi non-seulement d’acquitter leur part prise ferme, mais de consentir, comme leur contrat les y obligeait, des avances sur la seconde moitié de l’emprunt à réaliser, ont dû exiger de lui des conditions plus avantageuses encore que les premières, afin de se garantir contre les mauvaises chances que l’indifférence du public faisait tout d’abord courir à leurs capitaux. On a parlé d’une combinaison qui faisait ressortir pour les preneurs ferme le prix du 7 pour 100 à un taux notablement inférieur au prix de 75 francs, qui figurait au contrat. Cela ne suffisait pas encore, et, les besoins du trésor égyptien devenant plus pressans, il fallait pourvoir au vide laissé par l’insuccès de l’emprunt de 800 millions nominaux. C’est alors qu’on vit se produire l’émission d’un emprunt