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lorsqu’il verrait le drapeau français hissé au sommet de l’église. À ce signal, il devait se mettre en marche, se porter sur le chemin de fer de Soissons, puis sur Blancménil, Aulnay, Sevran. Le général Ducrot n’avait rien vu encore, il comprenait à l’intensité du combat qu’on devait avoir des embarras dans Le Bourget, il sentait que tout retard pouvait être funeste. Alors, n’écoutant que son inspiration, il commençait malgré tout son mouvement. Il lançait la division Bellemare, qui s’emparait rapidement de Groslay, de la ligne de Soissons. L’artillerie de la division Courty allait aussitôt s’établir à l’abri du chemin de fer pour canonner Aulnay, Blancménil. Le général Ducrot se disposait à poursuivre sa marche, lorsqu’à midi et demi il recevait un avis du général Trochu qui lui disait : « L’attaque du Bourget paraît avoir échoué, nous n’avons plus de point d’appui à gauche. Votre mouvement sur Aulnay et Blancménil ne peut continuer; arrêtez-vous... » Il fallait s’arrêter. L’ennemi distinguait du reste parfaitement que l’effort qui devait porter sur Aulnay était déjoué avant d’avoir été sérieusement tenté. Dès ce moment, toutes les batteries prussiennes, et elles étaient nombreuses, ouvraient un feu effroyable, auquel notre canon répondait énergiquement jusqu’au soir. On avait cherché une bataille d’infanterie, c’était plus que jamais un duel d’artillerie, duel, à vrai dire, plus bruyant que meurtrier. De ce côté, tout était fini.

Que se passait-il pendant ce temps à la droite de l’armée, dans cette partie en quelque sorte indépendante de l’action confiée au général Vinoy ? Les forces que le général Vinoy avait à sa disposition se composaient de la division d’Hugues, chargée de la garde d’Avron, de la brigade de gendarmerie d’Argentolle, appartenant à la nouvelle division de Malroy, de la brigade de marine du capitaine Salmon, détachée de la division Pothuau, de la brigade Blaise. L’artillerie était sous les ordres du général Favé, qui avait été attaché à la troisième armée après le 2 décembre, et qui, dans cette nouvelle journée, recevait une assez sérieuse blessure en conduisant ses batteries au combat. Dès la matinée, le général Vinoy avait engagé ses forces sous la protection d’Avron, dont le feu ouvrait le chemin à nos soldats. La brigade Blaise devait passer par Neuilly-sur-Marne sans s’y arrêter, et se jeter aussitôt sur la Ville-Évrard. Le capitaine Salmon avait sa direction à gauche sur la Maison-Blanche. A la suite de ces deux colonnes marchait la brigade d’Argentolle, et à mesure que le mouvement se dessinerait, les bataillons de garde nationale devaient venir prendre les positions dépassées par les troupes. L’opération s’accomplissait ainsi réellement. Les Saxons, après une courte défense, se repliaient assez précipitamment de la Maison-Blanche et de la Ville-Évrard, qui dès midi restaient en notre pouvoir.