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tude à la même hauteur des deux côtés du souterrain. Ces saillies correspondent aux temps d’arrêt subis par la surface de la lave fondue pendant son mouvement de progression; elles sont plus ou moins accentuées suivant la durée du stationnement de la lave. Quelques-unes, finement tracées, semblent l’œuvre d’un burin délicat, d’autres affectent la forme d’entablemens épais à surface supérieure plane et à face inférieure concave. On marche sur un plancher presque uni, représentant le dernier ruisseau de lave qui a circulé dans la galerie; des plis peu saillans, à convexité tournée vers la partie déclive du terrain, y attestent, la consistance pâteuse et la demi-solidification qu’offrait la matière du courant vers la fin de l’écoulement. Ici et là, on trouve à terre des petits tas de lave agglutinés et bizarrement contournés qui ont dégoutté en filamens visqueux des stalactites de la voûte. Une grande humidité règne dans toute l’étendue de ces souterrains. Les roches des parois sont fendillées; l’eau suinte ou ruisselle de chacune des crevasses. Le tunnel de lave fait l’office d’un immense tuyau de drainage; il soutire et reçoit l’excès d’humidité du terrain superposé. Dans celui du haut plateau de l’île de Terceire, l’eau est tellement abondante qu’elle forme un gros ruisseau dont le débit suffit pour mettre en mouvement les roues des moulins à blé de la ville d’Angra.

Les eaux qui alimentent ce courant proviennent d’un vaste champ de laves en partie désagrégées par l’humidité, envahies par les lichens et les mousses et à demi cachées par les broussailles qui poussent dans les intervalles. Une ceinture continue de rochers trachytiques grisâtres, divisés en prismes verticaux, environne cet espace au sud et à l’ouest ; du côté du nord se dresse une suite d’amas arrondis de scories basaltiques, les uns nus et arides, comme s’ils dataient d’hier, les autres enveloppés d’une épaisse végétation. Le tout forme une sorte de cirque incomplet de plus de 3 kilomètres de diamètre, dont l’ouverture tournée vers l’est est encore à demi obstruée par plusieurs cônes d’éruption. C’est là ce qu’on nomme le Caldeiraõ ou grande caldeira de Terceire. L’examen géologique des diverses parties de ce large enclos démontre qu’elles ont été successivement édifiées et permet de rétablir en partie l’histoire des révolutions dont ces lieux ont été le théâtre. Les laves trachytiques ont été les premières épanchées et ont formé probablement dans l’origine un dôme montagneux d’où sont sorties les coulées massives qui descendent en bourrelets tortueux sur les versans extérieurs. Un effondrement subit a entaillé cet amas et découpé verticalement dans les roches un gouffre bordé du côté du sud par les colonnades visibles encore aujourd’hui. L’abîme était béant du côté du nord. C’est là que les éruptions postérieures ont