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Bien que l’île de Graciosa n’ait que de petites dimensions, et où aucune puissante manifestation volcanique n’y ait eu lieu depuis plusieurs siècles, cependant d’examen de la vaste caldeira qui occupe une portion du territoire démontre l’intensité des phénomènes dont elle a été autrefois le théâtre. Le bord de la caldeira est à une altitude de 411 mètres. Un chemin bordé d’enclos cultivés et ombragé çà et là par les rameaux nerveux d’énormes figuiers y conduit de la ville de Fraya. La pente que l’on suit est assez douce. De la crête, on découvre toute l’étendue de la grandiose cavité Le fond de la dépression est à 300 mètres au-dessous du bord supérieur ; l’enceinte a la forme d’une grande ellipse d’environ 1,200 mètres de diamètre dans le sens du grand axe, et 600 dans le sens du petit.

Des mamelons formés de scories et de gros rochers de lave la divisent en deux moitiés. Du côté septentrional s’étend un petit lac où les laveuses de Praya font toute la journée retentir le bruit des battoirs ; les environs de la nappe d’eau sont couverts de morceaux de linge qui sèchent au soleil. Les flancs de la caldeira présentent un caractère sauvage tout particulier ; très abrupts, ils montrent de tous côtés la roche nue et grisâtre, divisée en prismes verticaux ou distribuée en assises horizontales. Le fond et les escarpemens inférieurs sont revêtus d’un maigre gazon que broutent les moutons et les chèvres ; c’est à peine si de rares fougères poussent dans les enfoncemens des roches, et donnent par leur verdure un peu de variété à ce paysage monotone. Aucun autre endroit des Açores n’offre le spectacle d’une pareille aridité.

Dans l’épaisseur des couches de lave qui constituent la crête vers le nord-ouest, existe un tunnel large en moyenne de 4 à 5 mètres et haut de 5 à 6 ; des stalactites pierreuses en garnissent les parois. À peu de distance de l’entrée, il se rétrécit de moitié en hauteur et en largeur, puis s’élargit de nouveau et suit, en la contournant, la face intérieure de la caldeira, jusqu’au point où il se termine en cul-de-sac, à une distance de 60 mètres environ de son orifice.

Après avoir passé au pied des deux mamelons qui occupent le centre de la caldeira, lorsque l’on arrive dans la moitié méridionale de cet immense cirque, on aperçoit un long sillon qui en traverse le fond dans la direction du nord-est au sud-ouest, c’est-à-dire dans le sens du petit axe. Ce sillon correspond à une fissure allongée, semblable au premier abord à toutes celles qui se manifestent au débat des éruptions volcaniques, et qui ne tardent pas à se remplir par l’afflux du fluide incandescent auquel elles servent d’issue. Les laves ont trouvé dans ce cas un écoulement d’un autre côté, probablement en dehors de la caldeira ; la fissure n’a laissé échapper que