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P.-J. PROUDHON
SA CORRESPONDANC ET SON HISTORIEN

P.-J. Proudhon, sa vie et sa correspondance, par M. Sainte-Beuve, 1 vol. in-18, 1872.

Le public n’avait pu se défendre d’un peu de surprise en voyant, il y a quelques années, l’un des maîtres les plus éminens de la critique contemporaine, délicat entre tous, prendre pour sujet d’une série d’études empreintes de la plus visible sympathie celui de tous les représentans du socialisme qui s’était montré non-seulement le plus radical, mais le plus porté à l’invective et à la menace. Comment s’expliquer ce choix ? Avait-il été déterminé uniquement par le souvenir de quelques relations dont la littérature avait été l’occasion et comme l’intermédiaire ? M. Proudhon, à un certain moment, méditait un ouvrage de critique où il devait passer en revue tous les contemporains. Ce plan, il ne devait pas le réaliser ; mais certaines parties s’en trouvent exécutées ou esquissées, particulièrement dans un de ses derniers et plus considérables ouvrages, la Justice et la Révolution, livre qui fit scandale et encourut condamnation. Il avait voulu, en vue de ce travail littéraire et moral qui exigeait une sorte d’initiation particulière, être mis en rapport avec le critique de notre temps certainement le mieux en état de la lui donner. On sent, à la manière dont M. Sainte-Beuve nous parle de ces rapports, qu’il demeure touché de l’espèce de déférence dont l’écrivain révolutionnaire fit preuve à son égard. Il se trouva d’ailleurs par là mis à même d’étudier de plus près certains côtés généreux et vraiment humains de