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Ah ! que sous la voûte infinie
Périssent les anciens soleils,
Avec les éclairs du génie
Tu feras des midis pareils ;

Tu feras des nuits populeuses,
Des nuits pleines de diamans,
En leur donnant pour nébuleuses
Tous les rêves des cœurs aimans;

Les étoiles plus solitaires
Eparses dans le sombre azur,
Tu les feras des cœurs austères
Ardens d’un feu profond et sûr;

Et tu feras la blanche voie,
Qui nous semble un ruisseau lacté,
De la pure et sereine joie
Des cœurs morts avant leur été ;

Tu feras jaillir tout entière
L’antique étoile de Vénus
D’un atome de la poussière
Des cœurs qu’elle embrasa le plus;

Et les fermes cœurs, pour l’attaque
Et la résistance doués,
Reformeront le zodiaque
Où les titans furent cloués !

Pour moi-même enfin, grain de sable
Dans la multitude des morts,
Si ce que j’ai d’impérissable
Doit scintiller au ciel d’alors,

Qu’un astre généreux renaisse
De mes cendres à leur réveil !
Rallume au feu de ma jeunesse
Le plus clair, le plus chaud soleil !

Rendant sa flamme primitive
A Sirius, des nuits vainqueur.
Fais-en la pourpre encor plus vive
Avec tout le sang de mon cœur !