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decin de notre marine, M. Pellarin, ont démontré que le choléra fut introduit à la Pointe-à-Pitre par le trois-mâts la Sainte-Marie, armé à Bordeaux le 14 septembre 1865, expédié le même jour pour Matamoros (Mexique), et arrivé en relâche à la Pointe-à-Pitre le 20 octobre suivant.

En somme, il est certain que le choléra se transmet d’un pays à l’autre par le déplacement des masses humaines, qui sont de véritables foyers mobiles. Il suit constamment les grandes voies de communication, les routes fréquentées, les fleuves navigables, etc. Qu’il s’agisse des pèlerins dans l’Inde, des caravanes dans la Haute-Asie et la Russie orientale, des armées à travers le Caucase ou dans notre expédition de Crimée, des émigrans en Amérique ou des pèlerins musulmans de La Mecque, les conditions de transmissibilité de l’épidémie sont toujours les mêmes, la propagation se fait toujours d’autant plus vite que les moyens de communication sont plus rapides.

Comment l’homme transporte-t-il le choléra? La question n’est pas complètement résolue. Les uns admettent que les germes épidémiques sont fixés dans l’organisme même, où ils conservent leur vitalité. D’autres, comme M. Pettenkofer, qui a publié à ce sujet de remarquables travaux, pensent que l’homme en tant qu’individu ne joue presque aucun rôle dans la propagation du mal. Ce médecin affirme que ni le corps vivant, ni le cadavre, ni les excrétions des cholériques n’ont le pouvoir de retenir et de multiplier le miasme inconnu qui est la cause de la diffusion morbide. D’après M. Pettenkofer, ce n’est même pas dans un état physiologique particulier des populations indiennes du bassin du Gange qu’il faudrait chercher l’origine du choléra; le mal naîtrait de certaines circonstances de sol et de climat, et de même ne se propagerait que grâce au concours de certains élémens telluriques et atmosphériques. Prétendre que ni l’homme ni les matières animales ne jouent aucun rôle dans la production des émanations cholériques, c’est peut-être aller un peu loin, et il n’est pas probable qu’on accepte généralement la théorie de M. Pettenkofer, si ingénieuse qu’elle paraisse. Le choléra se répand quelquefois par l’intermédiaire de personnes qui n’en sont pas atteintes : c’est le seul argument des partisans de la non-transmissibilité de la maladie, mais il n’a guère de valeur, si l’on établit que les germes cholériques peuvent avoir pour véhicule des vêtemens, des bagages, des marchandises, etc. Or c’est ce qu’ont démontré plusieurs auteurs, entre autres M. Grimaud de Caux. Ce dernier affirme même avoir observé à la poste de Marseille des cas de choléra transmis par des paquets de lettres.

Le choléra est-il contagieux ? Il est incontestable que le choléra