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Tout était fini. Les Orientaux exhalèrent leur douleur dans une dernière remontrance très véhémente et très libre, où ils se plaignaient de la manière dont on les traitait après l’obéissance qu’ils avaient montrée pour les moindres ordres de l’empereur. « On ruine la foi, disaient-ils, on introduit l’hérésie d’Apollinaire dans l’église malgré nos observations réitérées, et, puisqu’on ne nous écoute pas, nous n’avons plus qu’à secouer la poussière de nos souliers et partir, protestant comme saint Paul que nous sommes innocens de votre sang et de votre perte. » C’était trop pour les forces d’esprit et de corps que pouvait posséder Théodose : il rompit avec tant d’ennuis en fermant la conférence, et la clôture de la conférence était également celle du concile d’Éphèse. La lettre qu’il écrivit à ce sujet et que le temps a conservée est empreinte d’une tristesse profonde et du regret qu’il ressent de son impuissance ; il avait voulu par ses officiers d’abord, puis par lui-même, ramener le calme dans l’église troublée, croyant que c’était une impiété pour un souverain de ne point chercher un remède à de si grands maux ; il avait échoué… Si pourtant les évêques étaient animés d’un sincère désir de paix, ils le trouveraient tout prêt à recevoir leurs ouvertures et à renouveler ses efforts : autrement ils n’avaient plus qu’à partir. Il eut quelques paroles bienveillantes pour les Orientaux, et il leur dévoila que plus d’une influence puissante avait voulu lui arracher des rigueurs et des sévices contre eux ; mais il avait résisté courageusement, du moins il le jugeait ainsi. « Vous pouvez retourner dans vos églises, leur dit-il ; tant que je vivrai, je ne me résoudrai jamais à vous condamner, parce que vous n’avez été convaincus de rien en ma présence, personne n’ayant voulu entrer avec vous en conférence sur aucun des points contestés. » — Singulière consolation pour des gens qui, d’accusateurs qu’ils étaient venus, se trouvaient transformés en accusés dans la tête de l’empereur ! Théodose terminait par ces mots : « je ne suis point cause du schisme de l’église, et Dieu sait qui en est coupable ! » Celui-là évidemment, c’était Cyrille.

La conférence dissoute et les évêques renvoyés dans leurs foyers, il ne restait qu’une chose debout : le concile d’Éphèse. Tout le reste avait été réduit en poussière par l’empereur, à son insu peut-être et contre lui-même. Ce concile, dont il avait rescindé les actes par la bouche de ses officiers, par ses propres arrêts rendus dans le consistoire, qu’il avait déclaré une assemblée illicite, dont il détenait encore les chefs en prison, — ce même concile, il en avait exécuté successivement toutes les décisions, d’abord par l’exil et le remplacement de Nestorius, ensuite par l’éloignement des Orientaux, dont au fond il admettait les doctrines ; il ne restait donc plus rien à