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sités, sont plus visibles que dans l’état normal ; les ulcérations sont très dissemblables, quelques-unes sont taillées à pic, régulières ou irrégulières, visibles ou recouvertes de fausses membranes. L’intérieur du cœur et des vaisseaux sanguins est rouge, ecchymose même ; le poumon est emphysémateux. On a quelquefois remarqué le gonflement et le ramollissement du foie et de la rate. D’autres fois, ces organes ne sont pas sensiblement altérés ; la vésicule biliaire est pleine. Les muscles contiennent plus d’albumine soluble que dans l’état de santé, le sang plus de fibrine et moins d’eau, l’urine est albumineuse. — Des corpuscules fusiformes, des organites selon les uns, des organismes végétaux simples, sporophytes, selon les autres, se trouvent souvent, sinon toujours, dans la substance musculaire. — On ignore encore la nature de ces corpuscules et le rôle qu’ils jouent dans la peste bovine. La question est à l’étude. Quand l’épizootie est à sa période de début dans un pays, le mal a une marche très rapide. Si les animaux sont dans de mauvaises conditions de santé alors qu’ils sont exposés au principe contagieux, ils périssent après vingt-quatre ou quarante-huit heures de maladie ; si au contraire ils sont en bon état, ils vivent quatre, cinq jours, souvent sept ou huit ; c’est la durée la plus ordinaire de la maladie. Quant à la persistance de l’épizootie dans une localité, elle dépend des soins avec lesquels on la combat. Dans un mémoire couronné par la Société d’agriculture de Paris, le 16 mai 1765, Barberet faisait remarquer que, durant l’épizootie qui a régné de 1740 à 1750, on ne prenait dans nos campagnes aucune précaution pour empêcher le progrès du mal. On écorchait les bœufs et les vaches qui mouraient pour en garder la peau. « Économie funeste au bétail, disait-il, et ruineuse pour le maître. » Ce manque de soins, dans certains pays, constituait un danger pour les états voisins, grâce aux relations commerciales ; d’autres causes tendaient à produire le même résultat. Aussi Paulet pouvait-il écrire en 1775 : « La Hollande est aujourd’hui un foyer de contagion qui se renouvelle presque tous les ans, et qui ne cesse de répandre sur le reste de l’Europe des étincelles du feu qu’elle reçoit et nourrit dans son sein. » Serait-ce son climat, se demande l’auteur, qui la rend plus exposée qu’une autre ? Mais avant 1745 son climat était également insalubre, peut-être plus qu’il ne l’est aujourd’hui, et cependant ce mal y était inconnu. Serait-ce la malpropreté ? Il n’y a pas un peuple au monde plus propre que le peuple hollandais. Serait-ce le commerce ? L’auteur conclut affirmativement. En effet, l’invasion et la durée de ce fléau dépendent moins de sa nature et des conditions hygiéniques que des mesures administratives et des relations internationales des contrées où il sévit.