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qui, les détournant des soins de leurs ménages et de leurs occupations habituelles, ajouteraient encore à leur misère, et les exposeraient à rapporter la contagion des lieux qu’ils auraient fréquentés pour s’en garantir. »

L’étude des épizooties contemporaines (quelques-unes ont régné sous nos yeux) confirme les conséquences qui résultent de cette revue historique. Elle démontre que la peste bovine a son origine dans des contrées lointaines, et que nous n’en éprouvons les effets que lorsqu’elle nous est importée par la guerre ou par le commerce. À la fin du siècle dernier, les premières armées dirigées contre la France par l’Autriche nous apportèrent le terrible fléau. Il exerça aussi de grands ravages en Italie. Buniva estime qu’il a détruit près de 4 millions de bêtes. C’est d’après quelques observations faites en Piémont qu’il insista sur les inconvéniens des lazarets dans lesquels on voulait, non pas seulement mettre des animaux en quarantaine pour les observer, mais réunir des malades pour les traiter. Les troupeaux d’approvisionnement de nos armées du Rhin et de Sambre-et-Meuse en souffrirent ; néanmoins, d’après les descriptions qui nous ont été données de l’état de ces troupeaux, nous pouvons croire qu’il y régnait en même temps que la peste bovine une affection charbonneuse. Elle sévit dans l’Alsace, la Lorraine et les Vosges. Cependant les pertes éprouvées alors par l’agriculture française furent assez minimes, en comparaison surtout de celles qui furent la conséquence des invasions de 1814 et 1815. À cette dernière époque, la peste bovine, traînée à la suite des armées coalisées, fit de grands ravages dans les provinces de l’est et du nord de la France jusqu’à la Loire. Plusieurs vétérinaires nous en ont laissé des monographies. Comme aux autres époques, elle avait été importée par des bœufs hongrois, et parmi les personnes encore vivantes il y en a qui ont gardé le souvenir de ces animaux, remarquables par leurs longues cornes.

Depuis lors, nous avions été préservés de l’épizootie, quoiqu’elle ait sévi fortement en Orient pendant la guerre entre la Russie et la Turquie, et en Allemagne en 1845 ; en 1865 encore, elle a fait éprouver des pertes considérables à l’Angleterre. Elle y avait été importée par le commerce, et fut introduite sur le continent par des vaches expédiées de la Hollande à Londres qui, n’ayant pas été vendues, furent rapatriées dans les herbages de Rotterdam après avoir séjourné trois jours dans le voisinage de la métropole britannique. De Londres, elle s’étendit rapidement dans tous les comtés de l’Angleterre, et des environs de Rotterdam, dans la Hollande et dans les contrées voisines ; mais, bien qu’introduite plusieurs fois en Belgique, elle ne put s’y répandre : des mesures rigoureuses la limitè-