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et à restituer d’entières séries d’archontes qu’on ne savait comment classer ou qui étaient inconnus. Le volume de M. Albert Dumont ne contient absolument que ce travail, tout de raisonnement et de calcul ; c’est dire qu’il est fait uniquement en vue d’un problème chronologique à discuter et à résoudre. La méthode de l’auteur est purement scientifique et critique ; il ne dit pas un mot de plus qu’il ne faut, suivant lui, pour les besoins de sa démonstration ; il observe cette règle avec une sévérité toute stoïque. Je ne voudrais pas nier qu’il ait exagéré cette austère méthode ; pour suivre son exposition, il faut refaire tous les calculs, toutes les combinaisons avec lui, et quelquefois, à travers d’âpres sentiers, il ne tend pas d’assez près la main à son lecteur. L’illustre archéologue italien, Borghesi, dont M. Albert Dumont ne récusera pas l’exemple, est moins rigoureux. C’est plaisir de faire route avec lui dans les subtils détours de ses ingénieuses discussions ; il est vrai que nous le lisons aujourd’hui dans la magnifique édition in-quarto où les notes de M. Léon Renier, de M. de Rossi, d’autres encore, viennent, aux pas difficiles ou obscurs, apporter le secours d’une explication, d’une correction de texte, d’un commentaire utile. Qu’importe après tout, si le travail de M. Dumont témoigne d’une remarquable portée d’esprit, d’une vigoureuse critique et d’une science puisée aux meilleures sources ? D’ailleurs l’Essai sur la chronologie des archontes n’est qu’un fragment d’un ouvrage en deux volumes que M. Dumont se prépare à publier sous le titre, général d’Histoire de l’Ephébie. Nous n’avons ici que la partie de pure discussion ; la partie historique s’y joindra bientôt. M. Dumont se propose de faire paraître en même temps un important mémoire sur le sens des représentations figurées dites Banquets funèbres, mémoire couronné récemment par l’Académie des Inscriptions, et Belles-Lettres. Il donnera aussi, avec de nombreuses planches gravées, un curieux livre, qui s’imprime déjà, sur les inscriptions céramiques des anciens. Nous aurons encore la relation de son voyage en Thrace, d’où il a rapporté des inscriptions inédites. Ajoutez-y une dissertation traitant des tessères de plomb conservées à Athènes, et qui contient une intéressante théorie sur l’histoire de la signature individuelle dans l’antiquité. Voilà de nombreuses preuves d’une activité très louable, et, pour quiconque s’intéresse à l’avenir des études archéologiques dans notre pays, de quoi saluer à son commencement une noble entrée en carrière digne de tous les vœux.


A. GEFFROY


C. BULOZ