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Brougham, la destruction de tous les documens qui pouvaient en conserver le souvenir et en faciliter le rétablissement.

Depuis lors jusqu’en 1842, il n’avait plus été question qu’incidemment de cet impôt, et toujours d’une façon qui témoignait de la répugnance dont il était l’objet. En 1830, M. Poulett Thomson et sir Henry Parnell ayant demandé que le parlement, au lieu de procéder à une révision lente et partielle des tarifs, opérât d’après un système d’ensemble appliqué immédiatement sur une grande échelle, le premier de ces membres avait indiqué l’emprunt comme le moyen le plus propre de suppléer au vide momentané qu’une pareille réforme amènerait dans le trésor public, tandis que sir Henry Parnell avait conseillé de revenir à l’income-tax ; mais cette dernière opinion avait été vivement combattue au nom du gouvernement par lord Palmerston, et Robert Peel avait ajouté que, le précédent cabinet ayant eu à délibérer sur la même question, ses collègues et lui avaient reculé, même en la limitant aux seuls revenus de la terre, devant le rétablissement d’une contribution également préjudiciable à la propriété foncière, au commerce et à l’industrie. Quelques années après, en 1835, lord Chandos ayant proposé de supprimer le malt-tax, Robert Peel, alors premier ministre, s’était opposé à la prise en considération de la motion, parce que, dit-il, si le malt-tax était abandonné, il faudrait nécessairement « en remplacer la légère pression par le fouet du property-tax, » et en présence de cette perspective le parti agricole, d’abord très favorable à la proposition, s’était décidé à voter contre. En 1839, redevenu chef de l’opposition, le même homme d’état avait non moins vivement attaqué le projet de réforme postale présenté par le chancelier de l’échiquier, M. Baring, et il avait encore insisté sur cette considération que la mesure projetée, en jetant le trouble dans les finances de l’état, conduirait inévitablement au rétablissement de l’income-tax.

L’income-tax était donc l’épouvantail auquel avait eu sans cesse recours Robert Peel pour combattre toutes les réformes fiscales qui lui paraissaient devoir compromettre le revenu publie, et maintenant que ce revenu était en effet compromis, il n’y avait rien d’étonnant à ce qu’il vînt proposer l’emploi du remède héroïque dont il avait fait si souvent la menace. D’ailleurs il avait pour principe qu’une des conditions essentielles de bon gouvernement est l’équilibre assuré entre les recettes et les dépenses, que, pour obtenir cet équilibre, il n’est pas de sacrifices qu’un pays ne doive faire, et à diverses reprises il avait énergiquement exprimé son sentiment à cet égard. Ainsi, M. Poulett Thomson ayant eu occasion de déclarer en plein parlement que les déficits dans le revenu ne doivent pas être