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nouveau. L’essai en avait été fait sous Guillaume ÏII, mais d’une façon restreinte et peu fructueuse. En renouvelant l’épreuve, Pitt proposa de la généraliser, et de la faire porter sur les revenus de toute nature, ceux au-dessous de 60 liv. sterl. étant seuls exceptés.

Le projet présenté par Pitt fut adopté, et le montant des revenus imposables ayant été évalué à 102 millions de liv. sterl., le produit annuel de la taxe aurait dû. être de 10 millions de liv. sterl. ; néanmoins il ne s’éleva guère à plus de 7,500,000 liv. sterl., de sorte que pendant les trois années que dura encore la guerre l’échiquier n’en retira qu’une somme totale de 22 millions de liv. sterl., tandis que d’un autre côté, par des emprunts ou des consolidations, le capital de la dette publique s’accroissait de 90 millions de liv. sterl.

L’income-tax fut suspendu après la paix d’Amiens ; mais, dès que les hostilités furent reprises, M. Addington proposa de le rétablir au vingtième pour tous les revenus au-dessus de 150 liv. st. Quant aux revenus inférieurs, la taxe diminuait d’un shilling par livre jusqu’à 50 livres, et l’affranchissement devait être complet pour tout revenu au-dessous de ce chiffre. Pitt combattit comme insuffisant le plan d’Addington, et lorsque, rentré quelques mois après au pouvoir, il eut à présenter le budget de 1805, il demanda que les dépenses de la guerre et de la marine fussent portées de 23 millions à 37 millions de liv. st., que l’income-tax fût élevé au dixième et qu’il frappât tous les revenus, quel qu’en fût le chiffre, sauf les revenus dits professionnels qui n’atteignaient pas 50 liv. st. La matière imposable se trouva ainsi portée de 102 millions à 120 millions de liv. st., et de 1805 à 1816 le produit de la taxe, plusieurs fois augmentée suivant les besoins, varia de 10 millions à 15 millions de liv. sterl. La moyenne de ce produit pendant ces onze années fut donc de 11 millions à 12 millions de liv. st., et le montant total de 130 millions de liv. st. environ ; mais cette somme énorme resta inférieure encore aux dépenses : près de 180 millions de liv. st., qui, à raison du taux des négociations, augmentèrent le capital de la dette publique de 250 millions de liv. st., durent être empruntés, et 300 millions de liv. st. peuvent être considérés comme le chiffre réel des ressources que l’income-tax et le crédit ont fournies à l’Angleterre depuis la rupture de la paix d’Amiens jusqu’à la fin de 1815. Du reste, quelques services qu’il eût rendus à l’Angleterre dans la longue lutte qu’elle venait de soutenir, l’income-tax n’en avait pas moins pesé de la façon la plus lourde sur le pays. Aussi au mois de mars 1816 le parlement eut-il hâte, malgré l’avis du gouvernement, d’en voter la suppression, et, pour mieux témoigner que des circonstances exceptionnelles avaient pu seules en justifier l’emploi aussi prolongé, il ordonna, sur la demande de M.