Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 90.djvu/322

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

criminel, sur le sel nécessaire au pauvre, sur les épices à l’usage du riche, sur les clous qui ferment le cercueil et sur les rubans qui parent la fiancée. » Tout cela est bien changé, disait quarante-trois ans plus tard M. Gladstone en son exposé du budget de 1863, après avoir rappelé ces paroles de Sidney Smith. Aujourd’hui il n’y a plus de taxes sur les matières premières, ni sur la plus-value que leur donne l’industrie de l’homme, ni sur le sel des pauvres, ni sur les épices du riche, ni sur les substances utiles à la santé, ni sur l’hermine du juge, ni sur la corde du criminel, ni sur les clous du cercueil, ni sur les rubans de la fiancée, et cependant le produit des douanes et de l’excise est plus élevé qu’avant que l’industrie n’eût été affranchie, par l’abandon de toutes ces taxes. »

Ce fut M. Huskisson, président du bureau du commerce, qui en 1825 commença la réforme en remplaçant les prohibitions et les droits prohibitifs par des tarifs protecteurs de 30 pour 100, en réduisant les droits de douane sur quelques matières employées dans les fabriques anglaises. Plus tard, la suppression de l’amortissement ayant dégrevé le budget d’une charge importante, le parlement crut pouvoir faire un sacrifice sur le revenu, et en même temps, sans danger pour quelques industries favorisées par quinze ans de paix, entrer dans une voie économique plus libérale. De nouvelles réductions à l’importation furent donc successivement accordées sur diverses matières premières, sur divers articles fabriqués et sur certains objets de consommation, tels que le tabac, l’eau-de-vie et les vins de France. D’un autre côté, 5,500,000 livres sterling furent abandonnées sur l’excise, et le montant total des remises accordées depuis 1815, y compris celle de l’income-tax, s’élevait en 1842 à 20 millions de livres sterling ; mais c’est à partir de cette dernière époque surtout que les modifications et suppressions de tarifs ont été opérées d’après le plan résolument poursuivi de faire disparaître, sans léser ni compromettre les intérêts du trésor, toutes les entraves qui pouvaient empêcher l’industrie nationale de s’approvisionner et de produire au meilleur marché possible, et les opérations du commerce de s’étendre et multiplier au loin. C’est cette seconde phase de la réforme à tous égards la plus importante, ce sont les moyens employés, les résultats obtenus, que nous voulons présenter dans notre récit.


I

Depuis 1837, diverses causes étaient venues mettre le budget, anglais en déficit : d’abord la révolte du Canada, la guerre de l’Afganistan. celle de Chine, qui avaient augmenté de 4 millions de