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d’ardeur au travail que l’avoine, et cependant l’usage de l’ajonc ne s’étend pas au-delà des climats maritimes. Il lui faut, pour acquérir toutes ses propriétés alimentaires, un climat doux et un air humide. C’est seulement en Bretagne, où il est employé depuis lin temps immémorial, qu’il produit ces jets longs et touffus, presque inermes, qui ont fait donner à la variété qui les présente le nom d’ajonc queue de renard. Sous le climat continental, il est rabougri et épineux. Les propriétaires qui essaient de le faire consommer dans le centre de la France ne persévèrent jamais, à cause des embarras qu’entraîne l’administration de ce fourrage. Cette année cependant ne devrait-on pas essayer et persévérer ? On distribue l’ajonc après l’avoir haché et écrasé. Avec la meule à huile, on l’écrase facilement en l’arrosant pendant l’opération. Tous les herbivores le mangent ainsi préparé, et se trouvent très bien de son usage.

On a rarement essayé de faire consommer au râtelier la bruyère et le genêt à balai. Les troupeaux cependant s’en nourrissent en partie pendant l’hiver dans tout le midi, et le genêt surtout pourrait être heureusement utilisé, entrer dans la composition de provendes, de mélanges. Il est très nutritif, échauffant même ; au printemps, il détermine chez les moutons la génestade, mais cette maladie ne se déclare que lorsque le genêt est pris en grande quantité. S’il n’entre que pour une partie dans la nourriture des animaux, si, le jour qu’ils en mangent, les troupeaux vont sur un bon pâturage, ils conservent une parfaite santé. En raison du principe amer qu’il contient, le genêt contribue même à prévenir la pourriture, et, mêlé en justes proportions dans les provendes aqueuses, douceâtres, qui produiraient l’anémie, la cachexie, il agit comme médicament alimentaire ; il combat l’atonie. — Plusieurs espèces de fougères, en particulier la grande fougère, fougère proprement dite (pleris aquilina), peuvent être utilisées en ce moment ; les bœufs et les vaches les mangent au râtelier, quoiqu’ils les dédaignent sur pied. Les plantes aquatiques, les carex (laiches), les scirpes, les joncs, le poa aquatique, le roseau, sont peu sapides, dures, et généralement délaissées par les bêtes qui pâturent ; mais, coupées, hachées et macérées dans un liquide contenant des farines, des tourteaux, des résidus de distillerie, ou bien mêlées à des marcs de raisin, elles pourraient très bien être données aux bestiaux.

Nous ne connaissons pas la composition des plantes marines au point de vue de l’alimentation ; on les a surtout étudiées au point de vue des services qu’elles rendent à l’industrie. Cependant nous savons qu’elles sont salubres, qu’elles contiennent d’assez fortes proportions de matières azotées, et qu’elles sont très riches en principes minéraux, si bienfaisans pour la santé et si nécessaires pour favoriser le développement des animaux. Même dans les temps ordinaires, elles