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procureraient de précieuses ressources pour l’automne ; les pluies peuvent être insuffisantes pour pénétrer la terre des prairies, pour faire pousser les regains, et cependant humecter assez les terres meubles pour favoriser la pousse de plantes annuelles. Il importe aussi qu’ils ne laissent aucun coin de terre improductif. Le nom de récoltes dérobées donné à la culture des plantes annuelles indique assez leur place en dehors de l’assolement ; mais on n’en tirerait pas tout le profit qu’elles peuvent donner, si on se contentait de les semer sur une pièce de terre où la récolte n’a pas réussi : il faut les semer partout où un espace de terre reste libre. Les plus productives, les millets, le mais, le sorgho, sont surtout utiles ; quelques pieds de ces plantes donnent une assez grande quantité de fourrage pour qu’il soit avantageux d’aller le récolter.

Les crucifères en général, les choux en particulier, sont des plantes des terres siliceuses, des terres tourbeuses. Pourquoi ne les placerait-on pas dans des marais qui d’ordinaire restent improductifs ? Si l’on prend la précaution d’arroser le chou deux ou trois fois quand il est transplanté, il s’enracine facilement, résiste à la sécheresse, et reprend quand arrivent les pluies de l’automne et les fraîcheurs des longues nuits. Les fourrages aqueux fournis par les crucifères entrent avec profit pour la santé des animaux dans les rations composées avec des fourrages secs, durs, avec des pailles, des feuilles sèches, ainsi qu’on sera obligé de les composer cette année dans un grand nombre de fermes. Les haricots peuvent encore être semés. S’ils mûrissent, on aura, outre le grain, les fanes, qui peuvent rendre des services pour la nourriture des bestiaux ; si l’on s’aperçoit que les froids approchent avant la maturité, on les cueillera verts, et on obtiendra un excellent légume et un bon fourrage.

Chacun connaît les ressources que peuvent fournir d’autres plantes potagères : les laitues, les endives, la chicorée, les carottes, les betteraves, ces dernières si utilement répandues aujourd’hui dans la grande culture et si précieuses au point de vue industriel comme au point de vue de l’hygiène vétérinaire. A l’école d’Alfort, nous avons toujours fait semer les betteraves plus rapprochées qu’il ne convient de le faire pour le développement de la plante, et, en faisant éclaircir dans le courant de l’été, nous nous procurions un bon supplément de nourriture pour les moutons et pour les porcs. Il n’est plus temps d’avoir recours à cette pratique, et, malgré la rareté du fourrage, nous ne conseillerons pas d’effeuiller complètement, comme on le fait trop souvent dans les campagnes, les plantes d’été et d’automne, en particulier les betteraves, tout en ajoutant cependant qu’on aurait grand tort de ne pas utiliser les feuilles inférieures à mesure qu’elles se flétrissent, qu’elles jaunissent. On peut