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LA
DERNIERE CAMPAGNE
DE NOTRE ESCADRE D'EVOLUTIONS
1868—1870

Le travail qui va suivre ne touche à aucun fait de guerre ; il ne sera question ici que d’exercices et d’études commencés et achevés en pleine paix, dans le cours d’une de ces campagnes d’évolutions où s’essayaient les meilleurs types de nos bâtimens de combat, et qui pendant trente ans ont tant contribué à l’instruction de nos officiers et de nos équipages. La grande tradition en remonte à 1840, quand l’amiral Lalande, avec le capitaine Bruat pour second, cingla vers la baie d’Ourlac, au débouché des Dardanelles, à la tête de quinze vaisseaux de haut bord groupés dans le sillage de l’Océan. Presque tous les hommes qui figurent aujourd’hui en première ligne sur les cadres de la marine française étaient présens à cette renaissance de notre force navale, qui n’avait encore pour moteur que la voile, pour armement que des mortiers Paixhans et des canons du calibre uniforme de 30. Depuis lors, l’impulsion ne s’est pas un instant ralentie. Chaque escadre d’évolutions a vu se succéder des changemens plus ou moins profonds dans l’état du matériel et les services des hommes. Un jour apparut le vaisseau à hélice, un autre jour le vaisseau cuirassé, puis vinrent les bâtimens à tourelle et à éperon, enfin les béliers puissans par leur masse. De même pour l’armement, qui a produit des pièces et des projectiles de toutes les formes et de tous les calibres. La tâche de l’escadre d’évolutions était précisément de passer au crible toutes ces nouveautés ; elle écartait les unes, adoptait les autres, et les rendait