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compagnie, est au premier étage, qui se compose ainsi de deux chambres… La cheminée, commune aux deux cuisines (une par compagnie), se trouve au centre de l’édifice. Le réfectoire est en face de la cuisine, et l’on évite ainsi de permettre aux hommes de manger dans leurs chambres, ce qui est chez nous une cause de malpropreté et de mauvaises odeurs. Dans chaque chambre, deux poêles en fonte sont destinés à la fois au chauffage et à l’aération. Les militaires français qui ont visité ces baraques affirment qu’on n’y rencontre jamais ces odeurs désagréables si fréquentes le matin dans nos chambres de caserne. La statistique médicale démontre en outre qu’elles sont très salubres. — Ce résultat satisfaisant doit être attribué à deux causes : la première est la propreté habituelle de la population américaine et l’usage assidu du lavoir établi au rez-de-chaussée, pourvu de tous les appareils de toilette nécessaires ; sous ce rapport, nos soldats ne pourraient que gagner à ce qu’on les amenât à d’aussi bonnes habitudes, qu’ils rapporteraient plus tard dans leurs foyers ; la seconde est le système d’aération bien entendu qui caractérise ces constructions. Les Américains ont mis en usage dans leurs casernes les plus ordinaires des procédés auxquels nous n’avons recours que pour l’assainissement de nos hôpitaux les plus modernes et les plus perfectionnés[1]. »

Un des obstacles à la salubrité des camps résulte des matières que chacun des hommes jette chaque jour dans un de ces endroits qu’il n’est pas besoin de nommer. M. Roussillon expose comment on en triomphe dans les casernes et dans les camps ; au moyen de ces précautions, dit-il, on évite ces odeurs insupportables qui, pendant les jours chauds, signalent les abords des camps français, et on ne rencontre jamais ces miasmes qui se dégageaient des tranchées de Sébastopol. M. Roussillon donne aussi des détails utiles sur l’hôpital de régiment qui remplace notre infirmerie régimentaire ; c’est également fort hygiénique. Ce qui n’est pas moins intéressant ni moins instructif pour nous, ce sont les précautions prises pour le campement proprement dit, c’est-à-dire pour l’habitation sous la tente.

Les Américains se sont avec beaucoup de raison préoccupés de la nécessité de préserver les hommes de l’humidité du sol. Dans un pays où l’on exploite tant de forêts, on rencontre souvent, même en campagne, des approvisionnemens de planches ; mais indépendamment de cette ressource chaque soldat américain a une couverture en caoutchouc qu’il porte toujours avec lui, et qui est destinée à le garantir de l’influence de l’eau dont peut être imprégné le sol sur

  1. M. Vigo Roussillon, Puissance militaire des États-Unis, p. 129 et suiv.