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Saint-André-della-Valle sont d’un beau ton, clair et harmonieux ! Cela est doux à la vue comme la lumière d’un tiède jour de printemps qui sourit à l’œil avec tendresse, sans l’éblouir ni l’offenser, et insinue amoureusement dans l’âme les images des choses. Peu de peintures provoquent la rêverie à l’égal de ces fresques de Saint-André-della-Valle, qui, pareilles aux apparitions des esprits bienfaisans, se présentent au sein d’une lumière pure et comme tamisée, d’une fine fleur de lumière, pourrait-on dire. On reste commodément accoudé sur la rampe de la tribune sans se lasser de regarder ces aimables figures, en se laissant aller à des pensées d’une nature presque musicale, tant elles sont à la fois vagues et pénétrantes. L’âme physique est finement émue, l’âme morale s’embarque avec une innocente volupté sur l’océan des songeries. C’est le coloris caressant de ces fresques qui, en passant sur l’imagination, y fait éclore cette musique de la rêverie. D’autres fois, comme sur les lunettes du portique de Saint-Onuphre et dans la fresque de Saint-Grégoire, le Dominiquin affectionne un ton uniformément pâle, et peint toute sa fresque d’une seule couleur jaunâtre qui tient le milieu entre la nuance paille et le blanc nuance de chair. Ce qu’il y a de singulier, c’est que cette couleur blafarde qu’on ne peut faire mieux apercevoir au lecteur qu’en le priant de se rappeler la nuance de la peau de chamois bien préparée, loin de déplaire, possède au contraire un charme véritable. Il serait assez difficile de dire pourquoi le Dominiquin affectionnait cette couleur ; à Saint-Grégoire, on peut croire qu’il ne l’a employée que par opposition à la fresque éclatante du Guide, peinte en face de la sienne sur l’autre paroi de la muraille, et pour se servir d’autres armes que celles de son adversaire. Quelques raisons tirées du cadre des lunettes et de la manière dont elles sont frappées par la lumière auront sans doute déterminé pour Saint-Onuphre le choix de cette même couleur ; ce qu’il y a de certain, c’est qu’elle se prête merveilleusement à exprimer les scènes d’une nature purement morale telles que les épisodes de la vie de saint Jérôme dont