Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 88.djvu/355

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

injecté dans les veines d’hommes qui ont survécu, qu’il en a été de même dans les cas de transfusion du sang d’homme au chien » de celui de la brebis et du veau au chien, du veau à la brebis et au chamois, de celui du chien, du lapin et du cabiai à la poule et au coq. Ces phénomènes de physiologie, joints au résultat des observations anatomiques, ne laissent aucun doute sur l’identité spécifique des élémens dans toute la série animale.

Cette identité reconnue pour les solides s’étend aussi aux liquides de l’économie vivante, et ces liquides sont des parties non moins indispensables à l’accomplissement des phénomènes vitaux. Formées par un mélange de principes immédiats nombreux dissous dans l’eau à l’aide les uns des autres, et tenant souvent une, deux ou trois espèces d’élémens anatomiques en suspension, les humeurs sont plus complexes que les élémens anatomiques et moins complexes que les tissus. Longtemps l’apanage exclusif des chimistes, l’étude des humeurs, grâce à M. Robin, a repris sa place naturelle et légitime dans le cadre des études anatomiques. Ces organes mobiles sont étudiés avec la même méthode, les mêmes procédés et dans le même esprit de subordination aux actes physiologiques et pathologiques que les organes immobiles et consistans situés dans une position fixe.

M. Robin a donc fait pour les humeurs ce qu’il avait fait déjà pour les principes immédiats et les élémens anatomiques. Il les a mises à leur vraie place, les a classées et a indiqué leur rôle dans l’ensemble des actes organiques. Il divise les liquides animaux en trois classes : les humeurs constituantes, les sécrétions et les excrétions. Et c’est vraiment une satisfaction pour l’esprit que le tableau qu’il nous donne des rapports de ces trois classes dans le système des opérations de la vie. Les humeurs constituantes, sang, chyle et lymphe, portant partout dans l’intimité des tissus et des organes les matériaux nutritifs destinés à l’assimilation et l’oxygène destiné à faciliter le travail de la nutrition, sont les fluides vivifians par excellence. Ils baignent tout l’organisme, ils l’arrosent perpétuellement de force et de chaleur, ils l’entretiennent dans son harmonie et dans son intégrité. Ce sont de vrais milieux organiques intermédiaires entre le milieu extérieur dans lequel plonge l’individu et les élémens anatomiques situés dans les profondeurs du corps. Ils sont organisés et doués de nutrition, c’est-à-dire que la substance s’en renouvelle moléculairement d’une façon continue. Tandis que les sécrétions et surtout les excrétions sont des liquides dénués de vie et sont fabriquées par les glandes et les parenchymes aux dépens du sang, le sang se fabrique pour ainsi dire lui-même avec les matériaux qu’il reçoit tant par la voie du poumon que par celle du canal